7e séminaire des correspondants nationaux – Association des Cours Constitutionnelles Francophones

Association des Cours
Constitutionnelles Francophones

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7e séminaire des correspondants nationaux

Le fonctionnement des cours constitutionnelles en période électorale

  •  Paris
  •  2010
  • © ACCF
Les 18 et 19 novembre 2010 a eu lieu, à Paris, le 7ème séminaire des correspondants nationaux de l'ACCPUF sur le thème : « le fonctionnement des cours constitutionnelles en période électorale ».

Le fonctionnement du Conseil constitutionnel algérien en période électorale

Par Farida Laroussi, membre du Conseil constitutionnel

Introduction

Le cadre normatif du processus électoral détermine le fonctionnement des cours constitutionnelles.

L’activité des juges constitutionnels en période électorale et les compétences des cours constitutionnelles définies par les textes fondamentaux et les législations électorales sont liées à la reconnaissance du droit de vote dans les États concernés.

Les cours constitutionnelles jouent toutes un rôle dans le processus électoral : rôle variable certes, mais souvent partagé avec d’autres institutions.

Le prestige du juge constitutionnel et sa position privilégiée dans le système juridictionnel ont souvent incité le constituant et le législateur à lui confier des compétences considérables en matière électorale dont l’étendue varie selon les États.

En matière électorale les compétences des cours constitutionnelles sont essentiellement consultatives et juridictionnelles :

  • Les compétences consultatives dont sont investies certaines cours constitutionnelles ne s’appliquent que rarement à la matière électorale.

Ces compétences, même si elles ne concernent pas directement la matière électorale, ne sont pas dénuées de tout lien avec elle.
Ainsi, lorsque la Cour suprême du Canada est consultée par le Gouvernement sur la constitutionnalité d’une loi, ou lorsque la Cour constitutionnelle du Togo émet un avis sur des ordonnances, l’acte contrôlé peut être une loi électorale.

De même certaines cours, comme la Cour constitutionnelle du Niger, peuvent émettre un avis sur l’interprétation de la Constitution ; cette interprétation peut avoir trait aux compétences attribuées par la Constitution en matière de contentieux électoral.

  • Les compétences juridictionnelles des cours constitutionnelles sont reconnues dans les constitutions et sont, en règle générale, prévues dans les lois relatives aux juridictions constitutionnelles et éventuellement dans les législations électorales.

Dans le cadre d’une approche introductive des compétences des cours constitutionnelles en matière électorale, on constate l’influence du système français en Afrique francophone.

Ainsi , en Algérie, au Bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, au Congo, au Gabon, en Guinée-Bissau, au Liban, à Madagascar, au Mali, au Maroc, en Mauritanie, au Niger, au Rwanda, au Sénégal, au Tchad et au Togo, le juge constitutionnel est le juge des élections présidentielles (excepté le Maroc) et parlementaires.

L’ensemble de ces cours constitutionnelles sont donc saisies en premier et dernier ressort du contentieux post-électoral dans des conditions qui, sans être similaires, ressemblent à celles qui régissent la saisine du Conseil constitutionnel français.

Il convient de souligner que pour compléter les dispositions sommaires relatives aux élections qui sont contenues dans les constitutions, une législation électorale est donc essentielle à l’organisation des scrutins.

Cette législation doit prévoir toutes les mesures nécessaires à l’expression du vote des électeurs. Par conséquent elle s’intéresse à l’établissement des listes électorales, au dépôt des candidatures, aux règles régissant la campagne électorale, aux modes de scrutin, au déroulement du scrutin, à la proclamation des résultats et au contentieux électoral, c’est-à-dire à l’ensemble du processus électoral. Dès lors, la loi électorale est fondamentale pour la vie démocratique d’un État.

En période électorale, le fonctionnement des cours constitutionnelles en matière de contrôle de la régularité des élections présidentielles, parlementaires et des référendums peut se résumer en trois phases distinctes :

  • La phase pré-électorale qui correspond à la préparation des élections,
  • La phase électorale proprement dite qui correspond au déroulement du scrutin,
  • La phase post-électorale qui correspond à l’examen des procès-verbaux des commissions électorales, à la proclamation des résultats, et au contentieux électoral.

Compte tenu du thème retenu dans le cadre du 7ème séminaire des correspondants nationaux de l’A.C.C.P.U.F, nous nous limiterons dans cette intervention à présenter le Conseil constitutionnel algérien dans son fonctionnement en période électorale à l’instar des Cours constitutionnelles, en mettant en exergue ses spécificités.

La spécificité du Conseil constitutionnel algérien réside dans le fait qu’il ne soit pas intégré au pouvoir judiciaire et qu’il se définit comme étant une institution de contrôle véritablement autonome et totalement indépendante des autres pouvoirs constitués, chargée de veiller au respect de la Constitution.

Il convient de préciser que si les missions du Conseil sont déterminées par la Constitution, le constituant dans un souci évident d’indépendance de l’institution, lui a expressément attribué la prérogative de fixer ses règles de fonctionnement, empêchant ainsi le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif de participer à leur élaboration.

Cependant, si cette particularité par laquelle le Conseil s’affirme comme étant son propre législateur caractérise le contrôle de conformité et de constitutionnalité, il en est autrement du contrôle en matière électorale, pour lequel une loi organique portant régime électoral vient « s’installer » entre les dispositions constitutionnelles et le règlement fixant les règles de fonctionnement du Conseil.

Aussi notre étude portera-t-elle sur deux points essentiels :

  • Le contrôle de la régularité des élections : présidentielle, parlementaires et des opérations de referendum ;
  • Le contentieux électoral et le contrôle des comptes de campagne.

I / Le contrôle de la régularité des élections :

Outre le contrôle de constitutionnalité et de conformité à la Constitution dont il est investi, le Conseil constitutionnel contrôle également la régularité des grandes consultations politiques nationales :

• L’élection du Président de la République ;

• Les élections législatives ;

• Le referendum.

A) Le contrôle de la régularité de l’élection du président de la République :

1- La réception des dossiers de candidatures et l’examen de leur recevabilité :

La déclaration de candidature à l’élection présidentielle est déposée par le candidat en personne au plus tard dans les quinze jours qui suivent la publication du décret présidentiel portant convocation du corps électoral.

A ce stade le secrétaire général du Conseil constitutionnel assume la fonction de responsable du greffe recevant les déclarations de candidature.

Au même moment les directeurs d’études et de recherche assistent les membres du Conseil constitutionnel, tandis que le personnel administratif assiste la cellule informatique.

La déclaration de candidature se fait par le dépôt d’une demande enregistrée auprès du Conseil constitutionnel. Le candidat doit remplir les conditions prévues à la fois par la Constitution et par la loi électorale.
Après dépôt de la demande de candidature, le Président du Conseil constitutionnel désigne les membres rapporteurs en vue de l’examen des dossiers des candidats. Le dossier de candidature comprend des pièces administratives qui sont examinées personnellement par le membre rapporteur, ainsi que des pièces comprenant notamment les signatures accordées au candidat : 75.000 signatures au moins recueillies dans au moins 25 wilayas, le nombre minimal de signatures exigées par wilaya ne pouvant être inférieur à 1500.

Après vérification des pièces du dossier de candidature, les membres du Conseil constitutionnel passent à l’examen des formulaires relatifs aux signatures, assistés de magistrats de la Cour Suprême et du Conseil d’Etat.

A chaque élection présidentielle ou législative, l’administration du Conseil constitutionnel fait appel à une société spécialisée en informatique afin d’assister techniquement le Conseil constitutionnel. La mission de celle-ci débute par la saisie des formulaires, le calcul des résultats et ne s’achève qu’à la proclamation des résultats.

Après examen des formulaires, le Conseil constitutionnel déclare, dans un délai maximum de dix (10) jours à partir de la date de dépôt de la déclaration de candidature, la recevabilité des candidatures et ce, en rendant des décisions individuelles, notifiées aux intéressés, insusceptibles de recours, et publiées au Journal officiel.

Ainsi s’achève la première étape du travail du Conseil constitutionnel.

2 – La réception des procès-verbaux des commissions électorales :

Au lendemain du scrutin, les procès-verbaux relatifs aux élections parviennent au Conseil constitutionnel, la Commission électorale de wilaya ainsi que la commission chargée de l’élection pour la communauté algérienne à l’étranger devant terminer leurs travaux au plus tard à midi. Après réception des procès-verbaux électoraux, le Président du Conseil constitutionnel désigne les membres rapporteurs, assistés de magistrats de la Cour Suprême et du Conseil d’Etat.

Ensemble, ils procèdent au contrôle des procès-verbaux de la commission électorale de wilaya et de la commission électorale des résidents à l’étranger.

3 – L’examen des recours :

Les recours relatifs à l’élection présidentielle résultent des dispositions de l’article 166 de la loi électorale du 06 mars 1997.

Le Président du Conseil constitutionnel désigne, en application des dispositions du règlement fixant les règles de fonctionnement du Conseil constitutionnel, un ou plusieurs rapporteurs parmi les membres, afin d’examiner les recours.

Le rapporteur, assisté de magistrats, peut entendre toute personne et réclamer tout document nécessaire à l’examen des recours.

Au terme de l’instruction des recours par les membres rapporteurs, le Président du Conseil constitutionnel convoque l’ensemble des membres afin de se prononcer sur la recevabilité des recours, dans un délai de dix (10) jours à compter de la réception des procès-verbaux; les décisions relatives aux recours sont notifiées aux intéressés, puis publiées au Journal officiel. Elles sont définitives et insusceptibles de recours.

4- La proclamation des résultats

Les résultats sont proclamés en direct, par le Conseil constitutionnel représenté par son Président à travers les médias audiovisuels.

La proclamation accompagnée des résultats détaillés de l’élection, publiée au Journal officiel est la dernière étape de contrôle de la régularité de l’élection présidentielle, par le Conseil constitutionnel.

Il faut rappeler que depuis l’avènement de la Constitution du 23 février 1989, le Conseil constitutionnel a exercé ses fonctions de contrôle de la régularité de l’élection présidentielle à quatre reprises :

  • L’élection présidentielle du 16 novembre 1995 ;
  • L’élection présidentielle du 15 avril 1999 ;
  • L’élection présidentielle du 08 avril 2004 ;
  • L’élection présidentielle du 09 avril 2009.

Il a également contrôlé la régularité des opérations de référendum à trois reprises :

  • Le 28 novembre 1996, à l’occasion de la révision constitutionnelle ;
  • Le 16 septembre 1999, à propos de la loi sur la concorde civile ;
  • Le 29 septembre 2005, à propos de la charte relative à la paix et à la réconciliation nationale.

B) Le contrôle de la régularité de l’élection des membres du parlement :

1) Réception des procès-verbaux des commissions électorales après le scrutin :

Le Conseil constitutionnel reçoit les procès-verbaux centralisant les résultats des élections de l’Assemblée populaire nationale établis par les commissions électorales de wilaya ainsi que ceux établis par les commissions des résidents à l’étranger pour l’élection des membres de l’Assemblée populaire nationale. Il reçoit, en outre, les procès-verbaux des résultats des élections des membres du Conseil de la Nation (Sénat).

2) L’examen des procès-verbaux des commissions électorales :

Le Conseil constitutionnel examine le contenu des procès-verbaux sus-cités et arrête les résultats définitifs, conformément aux dispositions des articles 117, 118, 146, et 147 de l’ordonnance n° 97-07 du 06 mars 1997 modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral.

• La répartition des sièges entre les listes pour l’élection des membres de l’Assemblée populaire nationale, s’effectue en vertu des dispositions prévues aux articles 101 à 105 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.

• Pour l’élection des membres du Conseil de la Nation la répartition des sièges s’effectue entre les candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix en fonction du nombre de sièges à pourvoir conformément aux dispositions de l’article 147 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral sus-citée.

C) Le contrôle de la régularité des opérations de referendum :

En matière de referendum, le Conseil constitutionnel intervient le lendemain du scrutin.
Les électeurs sont convoqués par décret présidentiel quarante-cinq (45) jours avant la date du référendum (art.168 alinéa.1 de la loi électorale modifiée et complétée).

Le contrôle de la régularité des opérations de référendum par le Conseil constitutionnel se résume à la réception des procès-verbaux des commissions électorales, l’examen des recours, la vérification des chiffres et la proclamation des résultats.

1- la réception des procès-verbaux des commissions électorales :

Les procès-verbaux relatifs au vote sont envoyés sous plis scellés au Conseil constitutionnel selon les mêmes formes et procédures que pour l’élection présidentielle, c’est-à-dire le lendemain du vote avant midi.

Les procès-verbaux sont imprimés en trois exemplaires: un exemplaire est remis au membre rapporteur, le deuxième au Président du Conseil constitutionnel et le troisième au service de l’informatique, tandis que l’original est conservé au service des archives.

Après réception des procès-verbaux, le membre rapporteur, assisté de magistrats de la Cour Suprême et du Conseil d’Etat, procède au contrôle des résultats du referendum au niveau des circonscriptions électorales dont il a la charge. L’opération est arithmétique et les résultats sont consignés dans des tableaux.

Le membre rapporteur procède à la rectification des erreurs matérielles éventuelles.

2- l’examen des recours :

Les conditions qui s’appliquent en matière de referendum sont identiques à celles qui sont requises en matière d’élection présidentielle.

Ainsi, tout électeur a-t-il le droit de contester la régularité des opérations de referendum, en faisant mentionner sa réclamation sur le procès-verbal mis à sa disposition dans le bureau de vote, en vertu des dispositions de l’article 166 alinéa 1 de la loi électorale.

Les réclamations dûment signées par leurs auteurs, sont enregistrées auprès du greffe du Conseil constitutionnel.

Le membre rapporteur examine les réclamations du point de vue de leur recevabilité, tant au niveau de la forme que du fond.

Il prépare ses rapports et projets de décisions qui seront soumis à l’appréciation du Conseil constitutionnel lors de sa délibération, sur convocation de son président.

Les décisions relatives aux réclamations sont notifiées à leurs auteurs et publiées au Journal officiel.

3- la vérification des chiffres :

Après avoir statué sur les réclamations par décisions notifiées aux intéressés, le membre du Conseil constitutionnel remplit un certain nombre de tableaux afin de parvenir aux résultats du referendum ;
Avant de remplir le tableau « récapitulatif », chaque membre doit préalablement vérifier l’ensemble des tableaux précédents, et présenter les résultats de ses circonscriptions électorales.

Pour que les chiffres obtenus manuellement soient conformes à ceux obtenus par système informatisé, le membre doit coordonner son travail avec l’ingénieur en informatique et ce, avant la proclamation des résultats définitifs.

4- la proclamation des résultats définitifs :

La proclamation a lieu dans un délai de dix (10) jours à compter de la réception des procès-verbaux des commissions électorales.

Le Conseil constitutionnel proclame les résultats en direct à la télévision.

Le Président du Conseil constitutionnel donne lecture du communiqué du Conseil constitutionnel et des résultats de l’élection.

Cette proclamation est notifiée au Secrétariat général du Gouvernement aux fins de publication au Journal officiel.

Il/ Le contentieux électoral et le contrôle des comptes de campagne

Dans la poursuite de l’objectif de transparence de la vie politique, le contentieux électoral a été complété par un contrôle des ressources et des dépenses des candidats.

A) Le contentieux électoral :

1- L’examen des recours relatifs à l’élection des membres du Parlement :

En matière de contentieux électoral, le circuit de la saisine du Conseil constitutionnel est plutôt classique.

Tout candidat ou parti politique participant aux élections à l‘Assemblée populaire nationale ainsi que tout candidat à l’élection des membres du Conseil de la Nation a le droit de contester la régularité des opérations de vote en introduisant un recours par requête déposée au greffe du Conseil constitutionnel dans les délais fixés aux articles 118 et 148 de l’ordonnance n° 97.07 du 06 mars 1997, modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral, selon le cas.

La requête doit comporter les indications suivantes :

  • Les nom, prénom (s), profession, domicile et signature du requérant ainsi que l’assemblée populaire communale ou de wilaya à laquelle il appartient lorsqu’il s’agit d’élection du Conseil de la Nation ;
  • S’il s’agit d’un parti politique, sa dénomination, l’adresse de son siège, la qualité du dépositaire du recours et le pouvoir l’habilitant ;
  • Un exposé de l’objet et des moyens à l’appui du recours ainsi que les documents joints au dossier. La requête doit être établie en autant de copies que de parties mises en cause.

Il appartient dès lors au Président du Conseil constitutionnel de répartir les recours entre les différents membres désignés comme rapporteurs. La notification du recours est faite par tous voies et moyens au député dont l’élection est contestée, conformément aux dispositions de l’article 118- alinéa 2 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.

Le Conseil constitutionnel statue à huis clos sur le mérite des recours dans les conditions et délais fixés à l’article 118 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral, lorsqu’il s’agit d’élection des membres de l’Assemblée populaire nationale, et conformément aux dispositions de l’article 149 de ladite loi lorsqu’il s’agit des membres du Conseil de la Nation.

  • Si le Conseil constitutionnel estime le recours fondé, il peut par décision motivée, soit annuler l’élection contestée, soit reformuler le procès-verbal des résultats établis et proclamer le candidat qui est régulièrement et définitivement élu et ce, conformément à l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.
  • La décision rendue par le Conseil constitutionnel est notifiée au Président de l’Assemblée populaire nationale ou au Président du Conseil de la Nation selon le cas, ainsi qu’au Ministre de l’Intérieur et aux parties concernées.
  • La décision portant annulation de l’élection ainsi que la proclamation du Conseil constitutionnel portant élection du candidat élu sont publiées au Journal officiel.
  • Le conseil constitutionnel arrête les résultats des opérations de vote des élections législatives et statue sur les recours les concernant dans les formes et délais prévus par l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.

2- L’examen des recours relatifs à l’élection présidentielle :

Le Président du Conseil constitutionnel désigne parmi les membres du Conseil, un ou plusieurs rapporteurs chargés de procéder à la vérification des dossiers de candidatures, en application des dispositions constitutionnelles et législatives.

Le Conseil constitutionnel examine à huis clos les rapports et se prononce sur la validité des candidatures.

  • Le Conseil constitutionnel proclame les résultats définitifs du scrutin.
  • La proclamation du Conseil constitutionnel portant résultats définitifs du scrutin est transmise au Secrétaire général du Gouvernement aux fins de publication au Journal officiel.

3 – L’examen des recours relatifs au referendum :

Il convient de souligner que les règles inhérentes aux recours en matière de referendum sont identiques à celles exigées en matière d’élection présidentielle.

Tout électeur a le droit de contester la régularité des opérations de referendum, en faisant mentionner ses réclamations sur le procès-verbal mis à sa disposition dans le bureau de vote, conformément à l’article 166 alinéa 1 de la loi électorale.

Les réclamations dûment signées par leurs auteurs, doivent comporter les nom, prénom, adresse et qualité du requérant ainsi que l’exposé des faits et moyens justifiant la réclamation.

Les réclamations sont enregistrées au Secrétariat général du Conseil constitutionnel.

Dès réception des procès-verbaux selon les formes et délais prévus à l’article 171 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral, le Président du Conseil constitutionnel désigne un ou plusieurs rapporteurs.

Le Conseil constitutionnel statue sur la régularité des opérations électorales et les réclamations qui s’y rattachent dans les limites des délais prévus à l’article 171 de la même ordonnance.

Le Conseil constitutionnel proclame officiellement les résultats définitifs du referendum conformément à l’article 171 sus-cité.

B) Le contrôle des comptes de campagne :

Dans la poursuite de l’objectif de transparence de la vie politique, le contentieux électoral est suivi et complété par un contrôle des ressources et des dépenses des candidats.

Le Conseil constitutionnel algérien, à l’instar du Conseil constitutionnel français opère un contrôle du financement des campagnes électorales.

1- Contrôle du compte de campagne du candidat à l’élection du Président de la République :

En vertu des dispositions de l’article 30 du règlement du 28 juin 2000 fixant les règles de fonctionnement du Conseil constitutionnel, (modifié et complété par la délibération du 14 janvier 2009): Tout candidat à l’élection du Président de la République est tenu d’adresser son compte de campagne électorale au Conseil constitutionnel dans un délai maximum de trois (3) mois à compter de la publication des résultats définitifs et selon les conditions et modalités prévues à l’article 191 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.

Le compte de campagne doit comporter notamment :

  • la nature et l’origine des recettes dûment justifiées ;
  • les dépenses appuyées de pièces justificatives ;

L’expert-comptable ou le comptable agréé doit impérativement présenter un rapport sur le compte de campagne revêtant son sceau et sa signature, au Conseil constitutionnel.

Le compte de campagne peut être déposé par toute personne munie d’une procuration du parti ou du candidat concerné.

Le Conseil constitutionnel se prononce sur le compte de campagne électorale et notifie sa décision au candidat et aux autorités concernées.

La décision portant compte de campagne électorale du Président de la République élu est transmise au Secrétaire général du Gouvernement aux fins de publication au Journal officiel, en application des dispositions de l’article 191 alinéa 2 de l’ordonnance n° 97.07 du 06 mars 1997 modifiée et complétée, portant loi organique relative au régime électoral.

2 – Contrôle du compte de campagne des candidats aux élections à l’Assemblée populaire nationale :

En vertu des dispositions de l’article 43 du règlement fixant les règles de fonctionnement du Conseil constitutionnel, le compte de campagne doit être présenté dans les deux (2) mois qui suivent la publication des résultats définitifs de l’élection à l’Assemblée populaire nationale.

Le compte de campagne doit comporter notamment :

  • La nature et l’origine des recettes dûment justifiées ;
  • Les dépenses appuyées de pièces justificatives.

L’expert comptable ou le comptable agréé doit présenter un rapport sur le compte de campagne revêtant son sceau et sa signature au Conseil constitutionnel ;

Ce compte peut être déposé par toute personne en possession d’une délégation légale du parti ou du candidat concerné.

Le Conseil constitutionnel statue sur le compte de campagne électorale des candidats aux élections à l’Assemblée populaire nationale dans les conditions et selon les modalités prévues à l’article 191 de l’ordonnance portant loi organique relative au régime électoral.

Les comptes de campagne des candidats élus à l’Assemblée populaire nationale sont transmis au bureau de celle-ci.

CONCLUSION

Bien qu’issus de systèmes juridiques différents, les principes régissant le droit électoral sont communs à l’ensemble des cours constitutionnelles.

Les pays ayant en partage l’usage du français s’accordent à admettre que le suffrage doit être universel, égal, libre, secret et direct, en affirmant leur attachement à ces principes (ainsi qu’il résulte de la Déclaration de BAMAKO adoptée le 03/11/2000) et en s’engageant pour la tenue « d’élections libres, fiables et transparentes ».

Toutefois, cet engagement n’est pas propre à la francophonie, car l’organisation d’élections libres, pluralistes et démocratiques fait partie des standards reconnus par la communauté internationale.

Cependant, même si ces principes sont communs et reconnus universellement, l’organisation du processus électoral relève de la compétence souveraine des États.

Certaines dispositions constitutionnelles méritent d’être citées tant elles suffisent à définir le fonctionnement des cours et conseils constitutionnels en période électorale, objet de ce  séminaire des correspondants nationaux de l’ACCPUF.

C’est le cas de l’article 58 de la Constitution française qui dispose que :
« Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l’élection du président de la République. »
« Il examine les réclamations et proclame les résultats du scrutin ».
L’article 59 précise que « Le Conseil constitutionnel statue, en cos de contestation, sur la régularité de l’élection des députés et des sénateurs ».

Cette dernière disposition limite la compétence du Conseil au contentieux proprement dit pour les élections parlementaires alors que celle-ci couvre l’ensemble des opérations relatives à l’élection présidentielle et aux consultations référendaires.

Des dispositions rédigées dans des termes similaires se trouvent dans l’article 163 alinéa 2 de la Constitution algérienne sans, pour autant, qu’une différence apparaisse dans tous les textes, entre les deux scrutins nationaux.

Un nombre important de cours constitutionnelles sont ainsi investies d’une mission générale de surveillance au cours de laquelle elles exercent des attributions essentiellement juridictionnelles et, dans une moindre mesure, des fonctions administratives.

En proclamant les résultats définitifs d’une élection généralement lors d’une audience solennelle et en présence des médias (en Algérie l’audience de proclamation fait l’objet d’une retransmission télévisée), les cours constitutionnelles attestent de la régularité des opérations de vote.

Du fonctionnement des cours constitutionnelles en période électorale, il y a lieu de retenir que si elles s’insèrent dans le cadre de leur mission générale, leurs attributions en matière électorale ont de fortes répercussions sur leur organisation et nécessitent une adaptation de leur mode de fonctionnement :

D’abord, parce que les requêtes électorales représentent un contentieux souvent très volumineux, auquel les cours constitutionnelles doivent répondre dans les plus brefs délais. La mobilisation des services de l’institution est, par conséquent, totale.

Ensuite, parce que les affaires électorales requièrent de la part des cours l’accomplissement d’un contrôle concret : elles sont confrontées à un contentieux qui possède des caractéristiques propres au contentieux des droits subjectifs.

Enfin, parce que les cours constitutionnelles ne fondent plus leur contrôle uniquement sur les textes à valeur constitutionnelle, mais elles imposent également le respect de l’ensemble de la législation électorale.

Et si nous considérons les attributions non contentieuses, nous pouvons dire que le fonctionnement des cours constitutionnelles est profondément modifié en période électorale.

Par ailleurs, le droit électoral tend à s’élargir à la question du financement des campagnes électorales.
Les réglementations sont, sur ce point, encore récentes.

Le Conseil constitutionnel algérien fait partie des cours qui ont la charge de vérifier les comptes de campagne.

 

Le contentieux électoral au Bénin

par Mélanie HOUNDEGLA ABLO, Secrétaire Général Adjoint

Introduction

La Cour Constitutionnelle, Institution de contre-pouvoir, a été désignée par la Constitution comme seul juge de la régularité et de la validité des opérations électorales, et comptable de la proclamation des résultats définitifs des élections législatives et présidentielles au Bénin. Elle tient toutes ses attributions des dispositions constitutionnelles, notamment des articles 49, 81 alinéa 2, 82 alinéa 2 et 117 de la Constitution. Toutes ces prérogatives conférées à la Haute Juridiction sont reprises par les articles 42 alinéa 2, 52 et 54 de la Loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 et les différentes lois électorales dans le sens du respect des dispositions constitutionnelles sus- citées.

L’article 117 de la Constitution dispose en effet : « La Cour constitutionnelle :

  • veille à la régularité de l’élection du président de la république ; examine les réclamations, statue sur les irrégularités qu’elle aurait pu par elle-même relever et proclame les résultats du scrutin ;… ».
  • statue en cas de contestation sur la régularité des élections législatives. ».

Quant aux articles 42 et 52 de la loi organique sur la Cour constitutionnelle ils énoncent respectivement : « Les attributions de la Cour Constitutionnelle en matière d’élection à la Présidence de la République sont déterminées par la Constitution dans ses articles 49 et 117 et par les lois électorales en vigueur. »

La Cour veille à la régularité de l’élection du Président de la République, examine les réclamations, statue sur les irrégularités qu’elle aurait pu, par elle-même relever et proclame les résultats du scrutin conformément aux dispositions de l’article 49 de la Constitution. ».

« Conformément aux dispositions de l’article 81 alinéa 2 de la Constitution, la Cour Constitutionnelle statue souverainement sur la validité de l’élection des députés, ainsi que sur la régularité des élections législatives en cas de contestation comme il est prévu à l’article 117 alinéa 3 de la Constitution ».

En matière d’élection présidentielle la compétence de la Cour se trouve beaucoup plus étendue.

Depuis les opérations préalables (établissement de la liste électorale, présentation des candidatures, déroulement de la campagne électorale), en passant par le déroulement du scrutin, jusqu’au règlement du contentieux électoral, la juridiction constitutionnelle veille au grain.
Depuis son installation en 1993, la Cour Constitutionnelle a géré six (07) élections
dont trois (04) législatives (1995-1999-2003, 2007) et trois (03) présidentielles (1996-2001-
2006).

La gestion des élections législatives et présidentielle constitue de ce fait l’une des attributions importantes confiées à la Cour Constitutionnelle, et se résume en grande partie au règlement du contentieux électoral.

A – L’observation des opérations électorales.

La Constitution en son article 117, 2è tiret dispose : « La Cour Constitutionnelle…veille à la régularité de l’élection du Président de la République, …statue sur les irrégularités qu’elle aurait pu par elle-même relever ».

Cette disposition fait obligation à la Cour de contrôler elle-même les opérations électorales sur le terrain, ce qui explique que les conseillers se déplacent pour observer le déroulement des opérations électorales depuis l’inscription sur les listes électorales en passant par la campagne électorale jusqu’au scrutin lui-même.
Pour exécuter efficacement cette obligation constitutionnelle la Cour a éprouvé la nécessité de recruter pour chaque élection en qualité d’observateurs, des citoyens sur la base de leurs aptitudes professionnelles, leur connaissance du terrain, leur volonté ou disponibilité à faire le travail. Après une formation minutieuse ces délégués sont déployés sur le terrain dans une tenue appropriée permettant de les identifier. Leur mission consiste à sillonner les bureaux de vote pour y relever les irrégularités observées qu’ils consignent sur des fiches préimprimées.
Ils en dressent ensuite un rapport qu’ils remettent au Conseiller superviseur de leur zone. Les rapports des délégués sont exploités par la Cour lors de l’examen des résultats. Même s’il a été critiqué par certains chefs de partis le déploiement des délégués sur le terrain a eu des effets positifs, entre autre celui de dissuader des candidats à la fraude.

B- Le règlement du contentieux

Le contentieux électoral se définit comme l’ensemble des litiges ou contestations qui peuvent naître des opérations électorales. On distingue le contentieux relatif aux listes électorales, le contentieux des candidatures, le contentieux relatif à la campagne électorale et le contentieux des résultats.

En matière électorale le règlement du contentieux constitue l’attribution la plus importante de la Haute Juridiction. On distingue d’une part le contentieux avant le scrutin qui regroupe le contentieux des listes électorales, le contentieux des candidatures, le contentieux de la campagne électorale, d’autre part le contentieux des résultats. Ces différents contentieux sont organisés par les différentes lois électorales dont : la Loi n° 2009- 09 du 22 mai 2009 portant protection des données à caractère personnel en République du Bénin ; la Loi N° 2009-10 du 13 mai 2009 portant organisation de recensement électoral national approfondi et établissement de la liste électorale permanente informatisée ; la Loi n° 2007- 25 du 23 novembre 2007 portant règles générales pour les élections en République du Bénin.

Mais selon la spécificité de l’élection, des règles particulières sont votées soit, pour l’élection du Président de la République, soit pour l’élection des membres de l’Assemblée Nationale.

1) Le contentieux des listes électorales, des candidatures et de la campagne électorale

a) Le contentieux des listes électorales

Aux termes des dispositions de la loi électorale, la Commission électorale nationale autonome est chargée de la préparation, de l’organisation, du déroulement, de la supervision des opérations de vote et de la centralisation des résultats… pour transmission à la Cour constitutionnelle. La préparation et l’organisation s’entendent des opérations préélectorales d’où découlent des tâches comme l’établissement des listes électorales, source évidente de contentieux. Il est utile de préciser que depuis l’ère du renouveau démocratique, la désignation des membres de cette CENA est parfois contestée et la Cour a eu à connaître des recours comme dans sa Décision DCC 01- 011 du 12 janvier 2001.

Illustration :

Par deux requêtes du 09 janvier 2001 enregistrées à son Secrétariat les 09 et 11 janvier 2001, Monsieur Léon Bani BIO BIGOU, député, défère à la haute Juridiction « pour vice de procédure et violation du Règlement intérieur de l’Assemblée Nationale et de la Loi n° 2000- 18, la désignation des membres de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) et des membres des Commissions Electorales Départementales (CED) ». Messieurs Chabi L. SACCA KINA GUEZERE, Bernard DAVO LANI et Ahamed I. AKOBI, tous députés formulent la même demande. La Cour a dit et jugé que : « La Décision n° 01- 003/AN/PT de l’Assemblée nationale du 08 janvier 2001 portant élection des membres de la Commission électorale nationale autonome (CENA) et la décision n° 01- 004/AN/PT de l’Assemblée Nationale du 09 janvier 2001 portant élection des membres des Commissions Electorales Départementales (CED) sont, tant dans la forme qu’au fond, contraires à la Constitution ».

Il est à noter aussi que les différents scrutins ont été organisés depuis 1995 sur la base de listes électorales non informatisées.

La modernisation du fichier électoral par l’informatisation de la liste électorale longtemps prévue dans les différentes lois électorales et voulue par la classe politique est devenue effectif par le vote et la promulgation de la Loi N° 2009-10 du 13 mai 2009 portant organisation de recensement électoral national approfondi et établissement de la liste électorale permanente informatisée.

La supervision et la gestion de la liste électorale permanente informatisée sont désormais confiées à un organe administratif autonome, la Commission politique de supervision (CPS).

La Commission a, sous sa tutelle, un organe indépendant dénommé “Mission indépendante du recensement électoral national approfondi” (MIRENA). Le président de la Mission est nommé par la CPS. La MIRENA « coordonne toutes les activités techniques de mise en oeuvre du recensement électoral national approfondi et de la liste électorale permanente informatisée ».

Avant leur prise de fonction, les membres de Commission politique de supervision (CSP), de la Mission indépendante du recensement électoral national approfondi (MIRENA) et de la Commission électorale nationale autonome (CENA) sont installés par la Cour Constitutionnelle réunie en audience solennelle devant qui ils prêtent serment.

La loi portant organisation de recensement électoral national approfondi et établissement de la liste électorale permanente informatisée donne compétence à la Cour pour connaître de tout le contentieux de l’organisation du recensement électoral national approfondi et de l’établissement de la liste électorale permanente informatisée.

A cette fin, la Cour reçoit copie des procès-verbaux de recensement à la clôture du recensement. Tout citoyen peut présenter une réclamation en inscription ou en radiation devant la Cour à compter de la date d’installation de la Mission indépendante du recensement électoral national approfondi (MIRENA).

La requête se fait par simple lettre adressée à la Haute Juridiction par « les soins du chef d’arrondissement, du maire, du chef de la brigade de gendarmerie ou du commissariat de police ou du procureur de la République près le tribunal de première instance territorialement compétent, ou directement au Secrétariat général de la Cour.

Elle fait une situation particulière aux Béninois vivant à l’étranger qui doivent faire parvenir à la Cour leur recours éventuel par les moyens les plus rapides.

Les réclamations en rectification, inscription et radiation des électeurs frauduleux sont formulées par tout citoyen devant des démembrements de la mission indépendante responsable du recensement jusqu’au dernier jour de l’affichage. Ces réclamations transcrites sur des formulaires appropriés mis à la disposition des requérants éventuels par l’autorité en charge du recensement électoral national approfondi et de la liste électorale permanente informatisée ; cette autorité reçoit sans délai, par voie hiérarchique, ces formulaires et est tenue de les examiner dans les huit (08) jours suivant la date d’introduction des réclamations. Au cas où les réclamations s’avèrent fondées et justes, les corrections en découlant sont intégrées au fichier électoral national et aux listes électorales correspondantes.

Toutefois, la saisine de la Haute Juridiction est ouverte lorsque, dans un délai de dix (10) jours, le requérant n’a pas obtenu une suite ou n’est pas satisfait de la réponse à lui donnée devant les démembrements de la mission indépendante responsable du recensement. Le requérant dispose alors d’un délai de cinq (05) jours pendant lequel il introduit sa requête à la Cour. Le cas échéant, la Cour dispose de dix (10) jours à compter de sa saisine pour rendre sa décision.

Malheureusement, malgré la disponibilité et l’accord de la représentation nationale majorité/minorité parlementaire dans le vote de la loi et le soutien financier des partenaires au développement, le processus de modernisation du fichier électoral n’est pas à l’abri de sa remise en cause. Des marches de contestation et de soutien au processus s’observent ; des recours sont introduits devant le juge électoral qu’est la Cour pour abrogation et même par des députés qui l’ont soutenu. La Cour constitutionnelle statuant sur ces recours a rendu des décisions favorables à la poursuite du processus.

Illustration :

Par requête du 22 mars 2010 enregistrée à son Secrétariat à la même date, Monsieur le Président de la République sollicite d’une part, le contrôle de conformité à la Constitution de la Loi n° 2010- 12 portant abrogation de la Loi n° 2009- 10 du 13 mai 2009 et d’autre part demande de déclarer contraire à la Constitution la loi déférée. La même demande a été faite par sept députés. La Cour a déclaré que la Loi n° 2010- 12 portant abrogation de la Loi n° 2009- 10 du 13 mai 2009 est contraire à la Constitution (Décision DCC 10- 049 du 05 avril 2010) Les Décisions DCC 10- 050 du 14 avril 2010, DCC 10- 051 du 15 avril 2010, DCC 10- 052 du 15 avril 2010 ont réglé le problème de la désignation du membre de la société civile au sein de la Commission Politique de Supervision de la LEPI.

b) Le contentieux des candidatures

La loi fait obligation à tout candidat d’adresser une déclaration de candidature à la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA).. Outre l’identité du candidat la déclaration doit mentionner la couleur, l’emblème, le signe et ou le sigle choisi pour l’impression des bulletins uniques à l’exception des attributs de l’Etat ci-après : hymne national, drapeau, sceau, armoiries, devise.

S’agissant du choix d’une couleur, d’un emblème, d’un signe ou d’un sigle pour l’impression du bulletin, plusieurs candidats ne peuvent adopter des couleurs, des emblèmes ou des signes de nature à créer la confusion ou le doute dans l’esprit de l’électeur. Si un tel litige naît la Cour a pour mission de le trancher. Après enregistrement des candidatures par la CENA, celles-ci les transmet à la Cour qui fait examiner les candidats par un collège des trois médecins assermentés préalablement désignés, et au vue des observations médicales déclare recevable ou non telle candidature, s’agissant de l’élection présidentielle.

Le rejet d’une candidature doit être motivé. Ce rejet doit être notifié à l’intéressé dans un délai de dix (10) jours à compter de la date de dépôt et peut faire l’objet d’un recours devant la Haute Juridiction.

En cas de refus d’enregistrement d’une déclaration ou en cas de contestation, les candidats peuvent saisir la Cour constitutionnelle. Il en résulte que seuls les candidats peuvent saisir la Cour en cas de rejet d’une candidature (article 10 Loi n° 2000-19 du 03 janvier 2001 définissant les règles particulières sur l’élection du Président de la République. En matière de contentieux des candidatures les décisions rendues par la Haute Juridiction sont souvent des décisions d’irrecevabilité, parce que les requêtes sont introduites avant la publication par la CENA de la liste définitive des candidats et parce que le requérant ne justifie pas de sa qualité de candidat.

En ce qui concerne le délai de saisine de la Cour, il est à souligner qu’aucun délai n’a été prévu à cet effet. Cependant, il convient de préciser que ce délai s’induit de l’obligation qui est faite à la Cour de statuer définitivement avant le début de la campagne électorale. S’agissant plus spécifiquement des élections législatives, la décision de la Cour relative aux candidatures doit intervenir dans un délai de huit (08) jours.

Illustration :

Monsieur Rodrigue KOUDOHIN. Secrétaire du cercle de réflexion des jeunes de Houssa a demandé le rejet de la candidature de Monsieur Mathieu KEREKOU au motif qu’il s’est rendu coupable de multiples actes d’atteinte à la bonne moralité, à l’honneur et à la probité durant son quinquennat. La Cour a déclaré la requête irrecevable parce qu’introduite avant la publication par la CENA de la liste définitive des candidats et parce que l’auteur ne justifie pas de sa qualité de candidat. (Cf. Décision EL-P 01-002 du 06 février 2001).

c) Le contentieux de la campagne électorale.

Si tous les citoyens ne sont pas habilités à faire campagne en revanche, tout citoyen peut saisir la Haute Juridiction pour dénoncer des cas de violation des prescriptions relatives au bon déroulement de la campagne électorale. La Cour se prononce souvent sur des faits de corruption, de poursuite de la campagne au-delà des heures légales ou la veille du scrutin ; des entraves à la liberté de faire campagne. Au cas où les faits dénoncés peuvent influencer les résultats du scrutin, la Cour apprécie lesdites dénonciations lors du dépouillement des documents électoraux. C’est le cas de la campagne faite le jour du scrutin dans un bureau de vote par le port du signe distinctif d’un candidat.

Illustrations :

Par requête du 02 avril 1999 enregistré au Secrétariat de la Cour à la même date, Monsieur Gratien HOUNGBEDJI saisit la Haute Juridiction d’une plainte pour entrave au bon déroulement des activités de la campagne électorale pour les élections législatives du 30 mars 1999. La Cour a rejeté ladite requête au motif qu’elle ne dispose pas d’indicateurs pouvant lui permettre d’apprécier à la date de la saisine, l’influence que la non tenue du meeting aurait eue sur les résultats définitifs obtenus par l’UDES (Cf. Décision EL 99-132 du 14 juillet 1999).

2) Le scrutin et le contentieux des résultats.

a°) – Le scrutin

  • En application des lois électorales, les membres des bureaux de vote ont l’obligation de transcrire les conditions de déroulement du vote, ainsi que les résultats sur les documents électoraux que sont les procès-verbaux de déroulement du scrutin et les feuilles de dépouillement. Aux termes des dispositions de l’article 103 de la loi portant règles générales pour les élections en République du Bénin, ces documents électoraux doivent être accompagnés des bulletins annulés, des réclamations éventuelles rédigées par les électeurs, des observations éventuelles des membres du bureau de vote, du registre des votes par procuration ou par dérogation. Ces plis établis par bureau de vote, sont transmis scellés directement par la C E N A à la Cour Constitutionnelle.
  • L’ouverture et le dépouillement des plis se fait au fur et à mesure que la C E N A les transmet à la Cour.
    En procédant au dépouillement de chaque document électoral, la Cour prend connaissance des réclamations des électeurs, des observations des membres des bureaux de vote, de celles des représentants des candidats ou partis politiques annexées aux procès-verbaux de déroulement du scrutin. Les rapports des missions d’observation ne sont pris en compte lors du contentieux. Elle répertorie les irrégularités constatées et leur applique la sanction prévue par les lois électorales. Pour ce faire, le Secrétariat général de la Cour élabore à l’avance un mémento, document rassemblant tous les manquements au code électoral ainsi que les sanctions y afférentes.

b°)- Le contentieux des résultats.

Comment la Cour procède-t-elle pour aboutir à la proclamation des résultats ? Qu’en est-il des réclamations ou des recours ?

1 – La Cour reçoit les enveloppes scellées contenant les résultats transmis depuis les bureaux de vote par la CENA par les voies les plus rapides et sans conditionnement. L’article 102 en ses alinéas 8 et 9 prescrit : « En tout état de cause, la centralisation des cantines et des plis scellés doit être terminée, quarante-huit heures (48) heures au maximum après le jour du scrutin.
Les autres plis scellés sont envoyés à leur destinataire par la Commission électorale communale qui utilise, à cet effet, les voies hiérarchiques légales. » Cette recommandation légale permet d’éviter les reconditionnements des résultats.

2 – La Cour examine minutieusement le contenu de chaque pli, c’est – à – dire vérifie la régularité de toutes les opérations de vote à travers les documents électoraux (feuille de dépouillement, procès-verbaux de déroulement du scrutin, bulletins annulés, cahier de vote par procuration, par dérogation, réclamations rédigées par les électeurs, observations des délégués des partis politiques et des représentants des candidats). Il faut préciser que pour lui faciliter la tâche, la Cour a établi sur la base des lois électorales un mémento qui lui sert de guide.
3 – La Cour procède à des redressements, à des rectifications et/ou à des annulations jugées nécessaires. A cette étape, la Cour examine les réclamations rédigées et déposées par les électeurs, les délégués des candidats ou partis politiques dans les bureaux de vote et qui sont annexées aux documents électoraux transmis à la Cour Constitutionnelle.

Les principales irrégularités relevées concernent :

1 – Le matériel électoral :

  • bulletin de vote et enveloppes non réglementaires ;
  • urnes défectueuses ;
  • isoloirs défectueux, inexistants ou non réglementaires ;
  • imprimés de procès-verbaux et de feuilles de dépouillement non réglementaires ;
  • absence d’encre ou de cachet, etc…

2 – Les agents électoraux :

  • composition incomplète ou irrégulière des bureaux de vote ;
  • absence de scrutateurs, etc…

3 – La procédure de vote :

  • ouverture tardive de bureaux de vote ;
  • réutilisation des bulletins de vote puisés dans les réceptacles ;
  • vote de mineurs et d’étrangers ;
  • fermeture anticipée des bureaux de vote, etc…

4 – Le dépouillement des résultats :

  • dépouillement effectué hors des bureaux de vote et/ou sans éclairage suffisant ;
  • absence de décompte des voix ou décompte fantaisiste des voix ;
  • absence de procès-verbaux et/ou de feuilles de dépouillement ;
  • défaut d’annexer les bulletins nuls aux feuilles de dépouillement ;
  • recensement anormalement tardif des résultats ;
  • feuilles de dépouillement avec ratures et surcharges, etc…

5 – La Cour proclame ensuite les résultats.

 

– Pour ce qui concerne l’élection présidentielle.

Si au premier tour, aucun candidat n’a obtenu la majorité absolue pour être élu, la proclamation des résultats de l’élection présidentielle détermine, par ordre de suffrages, les deux candidats qualifiés pour se présenter au second tour.

Seuls les candidats ont qualité pour saisir la Cour en contestation (Décision EL-P 01- 046 du 14 mars 2001).

Tant pour la saisine que pour la décision de la Cour, aucun délai n’est expressément prévu. Mais logiquement, la contestation et la décision y afférente devraient intervenir avant le début de la campagne du second tour.

L’élection du Président de la République fait l’objet d’une proclamation provisoire (article 49 de la Constitution), soit au premier tour lorsqu’un candidat a obtenu la majorité absolue pour être élu (article 45 alinéa 1 de la Constitution), soit au second tour où est déclaré élu le candidat ayant recueilli la majorité simple (article 45 alinéa 3 de la Constitution).

Après la proclamation provisoire, les contestations sont admises. Seuls les candidats ont qualité pour agir. Ils doivent déposer leur contestation au greffe de la Cour dans les cinq (05) jours de la proclamation provisoire (article 49 alinéa 3 de la Constitution).

En cas de contestation dans ledit délai, la Cour est tenue de statuer dans les dix (10) jours de la proclamation provisoire. Sa décision emporte proclamation définitive ou annulation de l’élection présidentielle.

Si aucune contestation n’a été soulevée dans le délai de cinq (05) jours et si la Cour estime que l’élection n’était entachée d’aucune irrégularité de nature à entraîner l’annulation, elle déclare le Président de la République définitivement élu dans les quinze (15) jours qui suivent le scrutin.

– En ce qui concerne les élections législatives.

La Cour proclame les résultats définitifs des élections législatives au plus tard dans les soixante douze (72) heures de la date de réception des résultats des commissions électorales (articles 54 de la Loi organique sur la Cour constitutionnelle).

Après la proclamation des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle, la régularité des élections législatives elles-mêmes ne peut plus être contestée. Seule peut l’être, l’élection d’un député (article 55 de la Loi organique). La contestation devra tendre à l’invalidation de l’élection du député. Elle doit intervenir dans les dix (10) jours qui suivent la proclamation des résultats définitifs.

c°) – L’étude des recours.

La Cour forme en son sein deux sections composées chacune de trois membres désignés par le sort, auxquels s’ajoutent les rapporteurs adjoints nommés par ordonnance du Président de la Cour parmi les professeurs de droit et les praticiens du droit public. Les requêtes sont affectées à chaque section par le Président. Les sections instruisent les affaires dont elles sont chargées et présentent leur rapport en plénière. Les requêtes irrecevables ou ne contenant pas des griefs qui ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l’élection sont rejetées. La Cour et les sections peuvent le cas échéant, ordonner une enquête et se faire communiquer tous les documents et rapports ayant trait à l’élection. Elles peuvent commettre l’un de leurs membres pour procéder sur place à d’autres mesures d’instruction, audition des témoins, vérification des allégations des parties. La Cour dans sa décision peut rejeter le recours s’il n’est pas fondé, annuler l’élection contestée ou réformer le procès-verbal des résultats et déclarer le candidat régulièrement élu.

Les motifs invoqués pour contester les élections sont multiples : libéralités, utilisation des moyens de l’état, faveurs accordées aux électeurs, vote des étrangers, réalisation ou promesse de réalisation d’infrastructures (pistes, pont, centre de santé), votes multiples, vote des mineurs etc… La Cour vérifie la matérialité des faits quand c’est nécessaire. Elle examine toujours si les fraudes commises ont eu une influence déterminante sur les résultats du scrutin. (Cf. EL 03-047 du 21 mai 2003). « Considérant qu’il est de jurisprudence constante que le juge électoral n’annule une élection que dans la mesure où les fraudes électorales constatées ont eu une influence déterminante sur les résultats des élections : qu’à supposer même que les irrégularités alléguées aient été avérées, elles n’auraient pas suffi à elles seules à expliquer l’écart important (5.031 voix contre 21.572 voix) qui sépare le requérant et Monsieur André DASSOUNDO ; qu’il s’ensuit que la requête de Monsieur Ibrahim Soulé AGBETOU doit être rejetée.».

Conclusion

Le Bénin qui s’est engagé dans une démocratie pluraliste depuis la conférence de février 1990 a confié l’organisation et la gestion des élections à la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) et le contrôle de la régularité de ces élections et la proclamation des résultats à la Cour Constitutionnelle.
Le règlement du contentieux électoral au Bénin s’agissant des lois électorales tourne autour du dépôt de candidatures, de campagne électorale, de l’établissement de la liste électorale et des résultats. L’établissement de la liste électorale constitue le cordon ombilical dans tout processus électoral car des conditions d’établissement de la liste électorale, dépendra l’appréciation sur la crédibilité du scrutin. Si à un fichier électoral manuel peut se substituer celui amélioré et informatisé, la garantie de transparence sera effective.

La Cour a, depuis 1993 grâce à sa propre organisation, su maîtriser le contentieux électoral et le ramener à de justes proportions. En effet quelques mois avant le scrutin la Cour organise des journées de réflexion ou des séminaires qui lui permettent d’élaborer le plan des activités préélectorales, d’arrêter les critères de désignation des délégués qui aideront la Cour dans la supervision de l’élection, de confectionner des plaquettes à l’intention du grand public, d’élaborer son budget, de concevoir des séances de sensibilisation en direction des citoyens cibles. Ces efforts ont contribué à la réduction très sensible des recours. La Cour poursuit inlassablement ses efforts dans ce sens pour les élections législatives et présidentielle en vue et est consciente que de nombreux problèmes restent à résoudre entre autres le vote des lois électorales par le législateur à temps, l’aboutissement du processus de la liste électorale permanent informatisée, l’installation à temps de la CENA etc.

 

Le fonctionnement du service administratif du Conseil constitutionnel français en période électorale

par Jérôme Seguy, Trésorier, Chef de service administratif et financier et Nicolas Moreau, Responsable de la sécurité des systèmes d’informations

En dehors de ses missions de juge de la loi, le Conseil constitutionnel français est juge de la régularité des consultations nationales : élection présidentielle, élections parlementaires et référendums.

Il veille à toutes les opérations concernant l’élection présidentielle ; il est consulté par le gouvernement pour l’organisation de cette élection et donne son avis sur de nombreux textes afférents (décrets, circulaires …) ; il recueille les signatures des élus habilités par la loi pour la présentation de candidatures – les parrainages, dresse la liste des candidats, veille à la régularité des opérations électorales, examine les réclamations et proclame les résultats.

Le Conseil constitutionnel est aussi le juge des contentieux des élections législatives et sénatoriales, notamment sur saisine de la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques tendant à déclarer l’inéligibilité de candidats dont le compte de campagne a été rejeté.

Enfin, le Conseil surveille les opérations référendaires et en proclame les résultats.

Il s’agit là d’activités qui n’ont rien de secondaires et qui nécessitent un investissement en personnel et en moyens conséquents. Dans cet objectif, le Conseil constitutionnel a fait le choix d’une structure administrative légère, ajustée à sa mission constante de juge de la loi, tout en conservant une capacité d’adaptation forte en fonction des événements, due tant à un travail préparatoire important qu’à une modularité acceptée.

1) La structure permanente

Aujourd’hui, le Conseil compte quatre services placés sous l’autorité du secrétaire général, le service juridique, le service administratif et financier, le service de la documentation et le service des relations extérieures.

De façon générale, le service administratif et financier a en charge la gestion des membres et des personnels, la préparation et l’exécution du budget, la maintenance du bâtiment, l’intendance générale et le protocole. Avec le temps, il s’est en outre saisi de nouvelles missions essentielles : les travaux, la sécurité des personnes et des biens et surtout l’informatique.

Le service, placé sous l’autorité du trésorier, compte trois informaticiens, une assistante en charge du personnel, deux assistantes comptables, un responsable du service intérieur; en outre, les services logistiques et d’entretien qui lui sont rattachés comprennent dix-neuf collaborateurs à temps complet ou partiel. En outre, le service encadre les personnels placés auprès des membres. Enfin, le détachement de la Garde républicaine qui assure la sécurité du Conseil est placé sous la coordination du chef de service.

Ceci montre que le service est très transversal, axé sur le soutien aux membres et à l’Institution.
Or, pendant quelques mois tous les cinq ans, les missions qui lui sont confiées sont multipliées.

2) L’anticipation des consultations

La mission du service administratif et financier est d’abord de prévoir les échéances. Elle le fait donc tant sur les moyens financiers que logistiques.

a. Les questions financières

Budgétairement, le statut de pouvoir public constitutionnel du Conseil lui permet une plus grande latitude de gestion. Fondé sur la volonté du constituant de placer le Conseil constitutionnel à l’abri des pressions et ainsi de garantir son indépendance, il repose sur l’article 63 de la Constitution [1], l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel [2] et les décisions du Conseil constitutionnel n°2001-448 DC du 25 juillet 2001 [3] (loi organique relative aux lois de finances) et n°2001-456 DC du 27 décembre 2001[4]4.

Ainsi, à l’instar de la présidence de la République et des assemblées parlementaires, le Conseil constitutionnel détermine son budget, le notifie au ministre en charge du budget qui l’inscrit au budget de l’État sans pouvoir de modification ; le Parlement lui-même n’a pas la capacité de l’amender. A titre indicatif, le budget du Conseil constitutionnel pour 2010 est de 11,63 M€, et sera de 11,07 M€ en 2011.
Le Conseil dispose ainsi d’une capacité de variation importante de son budget d’une année sur l’autre et peut donc programmer les dépenses appropriées uniquement sur les périodes utiles, sans avoir à thésauriser dans la perspective de l’élection. Ainsi, un travail important est fait dans la préparation du budget de chacune des années électorales pour intégrer les besoins propres à l’élection. Par exemple, le budget pour 2011, inscrit à la loi de finances en cours de discussion, prévoit un crédit pour les premières dépenses d’organisation de l’élection présidentielle de 2012. Enfin, à titre préventif, il convient de préciser qu’en cas d’insuffisance notoire de crédits, le Conseil a la possibilité de demander des crédits supplémentaires en loi de finances rectificative : c’est arrivé rarement, uniquement à l’occasion de référendums.

b. La gestion du personnel

De même, le personnel du Conseil – 55 emplois à ce jour – n’est pas suffisant pour absorber toutes les tâches inhérentes aux missions propres à l’organisation et/ ou au contentieux des consultations nationales.

Ainsi, le Conseil constitutionnel dispose de 10 rapporteurs adjoints, désignés annuellement pour moitié au sein du Conseil d’Etat, pour moitié au sein de la Cour des comptes. Il s’agit là d’un vivier de qualité où le Conseil peut puiser sans complexe, rémunéré à la mission et par conséquent d’une charge financière moindre.

Ces effectifs sont complétés en fonction des besoins, on le verra plus loin.

c. Travaux

Depuis deux ans, le Conseil a entrepris d’adapter ses locaux en vue de la mise en oeuvre de la question prioritaire de constitutionnalité, à la fois pour absorber les effectifs supplémentaires recrutés dans ce cadre et aménager des locaux destinés à accueillir du public. L’exercice n’est pas simple dans un monument historique au coeur de Paris. Néanmoins, il est en passe d’être réussi et le Conseil constitutionnel aura gagné sans déménager plusieurs centaines de mètres carrés et bénéficiera d’équipements informatiques et techniques d’une autre technicité d’ici trois mois.

Or, par le passé, des salles sous les combles, difficilement utilisables en temps normal, servaient à accueillir les personnels de renfort. Ces locaux, profondément transformés, accueillent désormais la bibliothèque et le service de la documentation. Plutôt que d’aménager d’autres salles dans le seul objectif des consultations, les travaux en cours vont rationnaliser l’utilisation des espaces, permettant de ne pas bloquer des salles pour un usage de six mois tous les cinq ans. Nicolas Moreau reviendra tout à l’heure sur ces aménagements matériels et immatériels, car il en a porté tout le volet technique. Il suffit pour l’instant de mentionner la création d’un double réseau informatique, totalement indépendants l’un de l’autre et entièrement sécurisés, et la dissociation des accès afin de permettre la continuité du fonctionnement du Conseil constitutionnel avec la QPC tout en assurant la sécurité de la gestion des parrainages de l’élection présidentielle.

d. L’informatique

Dernier point du travail d’anticipation mené par le service, l’informatique et notamment la conception des logiciels appropriés. Nous avons développé cette année un logiciel de greffe spécifique au Conseil constitutionnel, dans la perspective de la QPC, mais qui a pris en compte immédiatement la gestion des élections de tous types. De même, nous sommes en train de concevoir un nouvel outil de gestion des parrainages.

La nécessité de continuité de service des fonctions critiques du système d’information a été prise en compte par une technologie de virtualisation des systèmes et la mise en place d’un plan de reprise d’activité : les services définis comme critiques, tels que le greffe, le système des parrainages, la messagerie, ne sont plus dépendants d’un seul matériel, mais répartis sur plusieurs serveurs dans deux lieux distincts. Ainsi, en cas d’incident majeur de la salle serveur principal, ces fonctions redémarrent en moins de 30 minutes dans la salle de secours et permettent un fonctionnement en mode dégradé mais suffisant pour les fonctions prioritaires du Conseil.

Ces solutions techniques sont adossées à des contrats de support et des procédures visant à assister – voire suppléer partiellement – l’équipe informatique en cas de sinistre. Le maintien en condition opérationnelle de tous ces systèmes est facilité par l’homogénéité du parc informatique. Ainsi, tous les postes de travail et tous les serveurs utilisent des systèmes Microsoft maintenus. Cette limitation des partenaires a permis le choix d’un contrat de location permettant l’augmentation ponctuelle des utilisateurs d’Office (Word, Outlook) sans coût supplémentaire : nous avons en effet choisi un mode de gestion très particulier des licences informatiques, celui de la location, qui permet temporairement de doubler le nombre de licences du Conseil sans frais supplémentaire. En outre, les contrats de maintenance et de soutien passés prévoient en période d’élection présidentielle une disponibilité vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept sur une durée de 6 semaines dissociables, alors qu’en temps normal, par simple souci de préserver les finances publiques, les contrats de maintenance sont liés à l’activité normale du Conseil constitutionnel.

A titre d’information, la dernière élection présidentielle a coûté 1,8 M€ sur le budget du Conseil – sans parler du coût pour le ministère de l’intérieur, qui porte la plus lourde part.

3) Le déroulement des opérations électorales

Pour autant, les phases électorales sont des tranches de vie en elles-mêmes. Nous comptons trois types d’élections : l’élection présidentielle, majeure dans la vie publique française, les référendums et les élections parlementaires. Evacuons ces dernières, qui ne représentent pour les services administratifs qu’une faible charge, grosso modo la prise en compte financière des rapporteurs adjoints. Je laisserai donc les représentants du service juridique vous en parler.

L’organisation des référendums ressemblant pour beaucoup à celle de l’élection présidentielle, niveau de sécurité réduit et parrainages en moins, nous nous contenterons d’évoquer cette dernière.

L’organisation de l’élection présidentielle compte plusieurs phases :

a. La présentation des candidats

Cette phase originale permet à un certain nombre de « parrains » élus (parlementaires nationaux et européens, élus départementaux et régionaux, maires et maires délégués, représentants des Français de l’étranger, élus des assemblées d’outre-mer… soit 45 000 personnes) de présenter un candidat. Cette phase est très sensible, car il est parfois difficile de réunir les 500 signatures nécessaires représentant 30 départements au moins et ne dépassant pas chacun plus de 10% des signataires. Bref, le Conseil constitutionnel n’a pas droit à l’erreur, la moindre suspicion remettant en cause tout le processus électoral.

Le service administratif et financier est chargé de l’organisation et de la coordination de cet événement, tant pour la réception incontestable des documents formalisés que pour leur traitement (livraisons spéciales de la Poste, ouverture, contrôle visuel initial, tri par candidat, horodatage et saisie). Durant les quelque 15 jours que dure cette phase, ce sont environ 18 000 formulaires qui sont traités, avec une permanence dédiée entre 5h et 1h du matin, en outre du travail normal de l’administration, encore plus sensible aujourd’hui avec la QPC qui ne s’arrête pas durant cette période – à la différence de l’examen des questions au titre de l’article 61 de la Constitution du fait de la suspension des travaux parlementaires.

II faut avoir conscience que cette phase est gérée exclusivement par le personnel permanent du Conseil constitutionnel, de tous grades et de toutes fonctions : chacun participe dans un esprit d’équipe remarquable, et ne quitte le bâtiment que pour dormir.

b. Le contrôle des opérations électorales

Le Conseil constitutionnel est bureau national centralisateur lors des deux tours de l’élection. II mène donc les opérations électorales en son sein et par ses délégués. Grossièrement, il nomme des délégués dans les bureaux de vote – en fait en déléguant aux premiers présidents de cour d’appel cette fonction par la transmission d’ordre de mission établis par le service administratif et financier. Ces quelque 1 900 délégués sont des magistrats, indemnisés forfaitairement à la vacation conformément aux textes réglementaires (300 €/ jour) ainsi que des frais kilométriques.

Les délégués établissent un rapport validant ou contestant les procès-verbaux des commissions locales de recensement. Ces rapports sont transmis au Conseil avec les procès-verbaux par la voie la plus expresse, par porteur ou par une société lauréate d’un marché public pour les départements métropolitains les plus éloignés ; pour l’outre-mer, ce sont des délégués qui transportent eux-mêmes vers Paris les documents utiles.
Le Conseil constitutionnel assure la prise en charge financière de toutes ces étapes. Le Collège siège sans discontinuer et mène un travail de vérification et d’examen des réclamations : à l’arrivée des procès-verbaux, une dizaine de calculateurs désignés par le ministère de l’intérieur reçoivent, enregistrent et contrôlent chacun d’entre eux; les rapporteurs adjoints les examinent à l’issue et présentent leur rapport au Conseil, qui tranche en séance.

De façon générale donc, ce sont des effectifs à géométrie très variable qui sont donc plus ou moins longuement placés sous l’autorité du Conseil constitutionnel – et par conséquent rémunérés par lui. Il s’agit là d’une charge extrêmement lourde pour le service, pour qui l’exercice de sa mission première continue par ailleurs.

c. Les fonctions de soutien

La sécurité est assurée par un escadron de la Garde républicaine spécialement affecté pendant toute la durée des parrainages et des opérations électorales, gage de crédibilité du scrutin. Le chef du service administratif et financier, responsable de la sécurité de l’établissement, en assure la direction. Cette tâche est compliquée aujourd’hui par la tenue de séances publiques dans le cadre des questions prioritaires de constitutionnalité, qu’il est bien sûr hors de question de supprimer durant cette période, la Constitution ne donnant que trois mois au Conseil pour trancher : les travaux évoqués plus haut permettent largement de résoudre le problème, mais la vigilance s’impose.
Moins glorieuses mais indispensables, les fonctions de soutien sont pilotées par le service: qu’il s’agisse de la restauration des personnels d’astreinte, du couchage des gardes républicains sur place, de la permanence téléphonique durant les jours de scrutin … Elles représentent des centaines d’heures de travail.

Enfin, l’informatique a un rôle essentiel que nous avons déjà abordé : durant les opérations électorales, le travail des informaticiens est précieux, tant dans la maintenance permanente du matériel dédié à la gestion de l’élection que dans celle des logiciels extrêmement précis conçus pour l’événement.

La sécurité et de l’intégrité de l’informatique sont sous le contrôle d’un « responsable de la sécurité des systèmes d’information », mis à disposition par le secrétariat général de la défense nationale et qui travaille en liens étroits avec le centre d’expertise gouvernemental de réponse et de traitement des attaques informatiques. Le système d’information ainsi que les logiciels métiers conçus par le Conseil, respectent le « besoin d’en connaître », c’est-à-dire la définition des droits donnés aux utilisateurs, selon leur grade et leur fonction, d’accéder et/ ou de modifier des données informatiques. Ce clois01mement déjà mis en place pour les serveurs de fichiers ou documents ainsi que pour le logiciel de greffe sera reconduit dans le logiciel des parrainages pour les élections présidentielles.
Par ailleurs, différents éléments de sécurité périmétriques assurent plusieurs niveaux de protection et de détections des attaques, virus et cela aussi bien en interne que depuis l’extérieur. Enfin, la sécurité parfaite n’existant pas, le choix d’un réseau distinct et l’absence de connexion internet pour le système assurant la comptabilité des parrainages a été mis en oeuvre. Voilà donc, de façon succincte, la façon dont le Conseil constitutionnel français aborde les questions financières et logistiques qui se posent à lui en période électorale. Régis Fraisse et Delphine Arnoud aborderont tout à l’heure les aspects du contentieux électoral et Lionel Brau vous décrira demain le rôle majeur de son service. Ces présentations distinctes ne doivent pas faire oublier que celte institution est un tout et que chacun apporte sa pierre à l’édifice dans un esprit commun.

Je vous remercie.


  • [1]
    l’article 63 de la Constitution indique qu’« une loi organique détermine les règles d’organisation et de fonctionnement du Conseil constitutionnel »  [Retour au contenu]
  • [2]
    article 15 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée : « un décret pris en conseil des ministres sur proposition du Conseil constitutionnel [qui] détermine l’organisation du secrétariat général » ; article 16 de la même ordonnance dispose que « les crédits nécessaires au fonctionnement du Conseil constitutionnel sont inscrits au budget général. Le Président du Conseil constitutionnel est ordonnateur des dépenses ».  [Retour au contenu]
  • [3]
    décision n°2001-448 DC du 25 juillet 2001 (loi organique relative aux lois de finances) : « 25. Considérant que, si les crédits sont votés par mission, ils «  sont spécialisés par programme ou par dotation au sein de chaque mission  » ; Qu’aux termes du dernier alinéa du I de l’article 7, «  un programme regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent dactions relevant dun même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d’intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l’objet d’une évaluation  » ; que, toutefois, deux missions regrouperont des crédits par dotation, pour la mise en oeuvre dactions ne pouvant donner lieu à la définition d’objectifs; qu’en particulier, le troisième alinéa du I de l’article 7 prévoit qu’ »une mission spécifique regroupe les crédits des pouvoirs publics, chacun dentre eux faisant l’objet d’une ou plusieurs dotations  » ; que ce dispositif assure la sauvegarde du principe d’autonomie financière des pouvoirs publics concernés, lequel relève du respect de la séparation des pouvoirs »  [Retour au contenu]
  • [4]
    décision n°2001-456 DC du 27 décembre 2001 (loi de finances pour 2002): « 47. Considérant que ces dispositions ne sauraient être interprétées comme faisant obstacle à la règle selon laquelle les pouvoirs publics constitutionnels déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement; que cette règle est en effet inhérente au principe de leur autonomie financière qui garantit  » la séparation des pouvoirs; que, sous cette réserve, l’article 115 est conforme à la Constitution »  [Retour au contenu]

 

Expérience de la Cour constitutionnelle du Gabon

 

Durant la période de transition : juin à octobre 2009

L’année 2009 a été pour le Gabon une année très difficile en même temps qu’elle a marqué une étape décisive de son histoire comme l’a été l’année 1967.

L’une et l’autre ont ceci de commun qu’elles ont enregistré, en cours de mandat, le décès du Président de la République en exercice et la désignation de son successeur, avec cette précision que le processus y ayant conduit s’est opéré différemment.

Dans le premier cas, il n’y a pas eu vacance de la Présidence de la République à proprement parler, dès lors que Monsieur Albert Bernard BONGO, alors Vice-président de la République élu, partageait la légitimité avec le Président Léon MBA pour lui succéder automatiquement.

Dans le second cas, les règles constitutionnelles relatives aux modalités de succession à la tête de l’Etat en cas de vacance de la Présidence de la République ayant changé, le successeur du Président Omar BONGO ONDIMBA a dû se soumettre au suffrage universel direct, après l’observation d’une période de transition telle que prévue par la Constitution en vigueur. Le Gabon était ainsi appelé à vivre une expérience nouvelle aussi incertaine qu’exaltante.

Incertaine, parce que d’aucuns inclinaient à penser que ce pays allait, à son tour, basculer dans la spirale de la violence et de l’instabilité.

Exaltante, parce que c’était l’occasion pour le Gabon d’administrer la preuve de la solidité de ses institutions, de la vitalité et de l’enracinement de l’Etat de droit démocratique au Gabon.

S’agissant des institutions de la République, celles-ci ont joué pleinement leur rôle, et ce, dans le strict respect des valeurs républicaines.

Au nombre de ces institutions, figurait en bonne place la Cour Constitutionnelle. Gardienne juridique de la Constitution et organe régulateur du fonctionnement des Institutions et de l’activité des pouvoirs publics, elle a été l’élément moteur de la mise en oeuvre et de la gestion de la transition. De même, l’ensemble du processus de l’élection anticipée qui s’en est suivi n’a connu l’aboutissement que l’on sait, que grâce à la totale implication de la juridiction constitutionnelle.

De la mise en oeuvre et la gestion de la transition

Dès l’annonce officielle du décès du Président Omar BONGO ONDIMBA, la Cour Constitutionnelle, saisie par le Gouvernement, a aussitôt fait application des dispositions de l’article 13 de la Constitution qui prescrivent, entre autres, qu’en cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit, les fonctions du Président de la République, à l’exception de celles prévues aux articles 18, 19 et 116, alinéa 1er, sont provisoirement exercées par le Président du Sénat ou, le cas échéant, par le premier Vice-président du Sénat.

Dans les faits, la mise en oeuvre, pour la première fois des prescriptions de l’article 13 de la Constitution n’a pas été aisée. Loin s’en faut.

En effet, à l’épreuve de la réalité, ces dispositions se sont avérées lacunaires, ce d’autant plus qu’elles n’avaient jamais donné lieu à des textes d’application précisant leur contenu et leur portée.

Aussi, pour y parvenir, la Cour Constitutionnelle a-t-elle dû puiser dans son expérience et faire preuve de beaucoup de sagesse et de créativité.

Ainsi, dans sa toute première décision relative à la vacance de la Présidence de la République, rendue le 9 juin 2009, elle a presque fait oeuvre législative en complétant les dispositions de l’article 13 de la Loi fondamentale.

A cet effet, elle a jugé que l’exercice des fonctions du Président de la République étant assujetti à la prestation préalable du serment prévu à l’article 12 de la Constitution, le Président du Sénat désigné dans la même décision Président de la République intérimaire, devait prêter serment.

La Cour Constitutionnelle a même été emmenée à prendre une part très active dans toute l’organisation concrète de l’entrée en fonction du Président de la République intérimaire.

Par ailleurs, l’article 14 de la Constitution prévoyant l’incompatibilité de la fonction de Président de la République avec l’exercice de toute autre fonction publique, la Cour a décidé que l’intérim du Président du Sénat sera assuré par le premier Vice-président de cette institution.

De même, la Cour Constitutionnelle a précisé, dans une autre décision que les fonctions du gouvernement cessent automatiquement à l’issue de la prestation de serment, soit du Président de la République élu, soit du Président de la République par intérim.

Ce qui a permis d’éviter une crise institutionnelle en une période jugée particulièrement sensible et pleine de risques de tous ordres.

Une fois écarté le risque d’une crise institutionnelle, il restait à oeuvrer pour l’élection du nouveau Président de la République.

De l’organisation du scrutin anticipé

A cette étape, La Cour Constitutionnelle a dû faire preuve de beaucoup de savoir-faire en raison de quelques difficultés relativement à l’applicabilité de certaines dispositions légales, au regard de la particularité du contexte.

Il faut relever, qu’alors que l’article 11 alinéa 2 de la Constitution prévoit que : « l’élection du Président de la République a lieu un mois au moins et deux mois au plus tard, avant l’expiration du mandat du Président en exercice », l’article 13 alinéa 3 de la loi fondamentale prescrit en revanche que : « en cas de vacance de la Présidence de la République le scrutin pour l’élection du nouveau Président de la République a lieu, sauf cas de force majeure constatée par la Cour Constitutionnelle, 30 jours au moins et 45 jours au plus après l’ouverture de la vacance ».

Il est vrai qu’en fixant ces délais très courts d’organisation du scrutin anticipé, le constituant était soucieux de ne pas confier longtemps la gestion du pays à une personnalité qui ne bénéficie pas de la légitimité du peuple.

A l’évidence, ces délais se sont avérés très courts et non réalistes à cause du temps de deuil et d’organisation des obsèques qu’il fallait nécessairement observer.

Si pour l’élection en temps normal le législateur a prévu des délais assez longs, notamment en ce qui concerne les opérations relatives à l’établissement des listes électorales, la distribution des cartes d’électeurs, le dépôt des candidatures, la détermination des centres de vote, il est resté muet s’agissant de la situation exceptionnelle découlant de la vacance.

Face à cette situation, la Cour Constitutionnelle, outre qu’elle a prorogé les délais de ce scrutin particulier en tenant compte de la période d’organisation des obsèques du Président défunt, elle a précisé les délais d’accomplissement de toutes les opérations préélectorales à l’intérieur de la période de transition par elle arrêtée.

A l’instar de la question des délais, les modalités de révision de la liste électorale en vue de ce scrutin particulier, ont fait l’objet d’interprétations diverses. L’on se demandait en effet si la révision de la liste électorale en vue dudit scrutin devait uniquement prendre en compte les jeunes ayant atteint l’âge de la majorité électorale, les personnes ayant changé de domicile et les radiations des personnes décédées, ou s’il fallait au contraire procéder à une révision générale de celle-ci.
La Cour Constitutionnelle a, tout en indiquant qu’il fallait procéder à une révision générale de la liste électorale, invité les autorités compétentes à déterminer les délais d’accomplissement de chaque opération y relative.

S’agissant de l’organisation proprement dite du scrutin anticipé, il convient de noter l’institutionnalisation des réunions hebdomadaires, sous la présidence de la Cour constitutionnelle, auxquelles prenaient part tous les intervenants à l’élection, à savoir :

  • la Commission Électorale Nationale Autonome et Permanente;
  • Le Conseil national de la Communication ;
  • le Ministère de l’Intérieur ;
  • le Ministère des Finances ;
  • le Ministère de la Communication ;
  • les Forces de sécurité ;
  • les Forces de défense ;

Il faut noter qu’au cours de ces séances de travail non seulement l’intervention de la Cour a été salutaire face à certains blocages mais surtout que c’est la Haute juridiction qui a dû procéder aux arbitrages budgétaires entre les Ministères dépensiers et les intervenants à l’élection, lorsque les dotations allouées ne permettaient pas un fonctionnement optimal des organes concernés. Par ailleurs, pendant cette période de transition, la Cour Constitutionnelle a été amenée à régler des conflits de compétence entre institutions, ou entre organes intervenant dans le processus électoral.

Il est à retenir que de nombreuses situations non prévues par la loi se présentaient au cours de la période transitoire.

La Cour Constitutionnelle avait très vite compris qu’elle se devait, en permanence, de faire preuve d’anticipation pour éviter que le vide créé par la vacance, s’il n’était pas rapidement comblé, ne donne naissance à un sentiment d’insécurité, faire preuve d’inventivité pour pallier les carences de la loi, et faire preuve de créativité dans les modalités pratiques d’organisation du scrutin anticipé.

De la période post-électorale

Il importe de noter que lors du contentieux électoral qui s’en est suivi, la Cour a fait droit à la demande de recomptage des voix exprimée par certains candidats, non sans avoir invité lesdits requérants, par le biais d’Huissiers de Justice commis par leurs soins, à assister à l’exécution de cette mesure.
Même si par la suite, contre toute attente, les intéressés ont rejeté les modalités de mise en oeuvre de cette mesure de la Cour, l’opération de recomptage des voix s’est déroulée en présence d’un huissier de justice commis par la Cour Constitutionnelle.

Il faut souligner que ce recomptage a été effectué sur la base de l’ensemble des procès-verbaux des bureaux de vote auxquels étaient annexées les listes d’émargement et les feuilles de dépouillement, observateurs internationaux.

Cette mesure de recomptage ainsi que la diffusion en direct par les médias nationaux et internationaux de l’audience publique relative au contentieux électoral ont eu le mérite de dissiper le doute qui commençait à s’établir dans l’esprit de nombre de citoyens, dès lors que plusieurs candidats à l’élection présidentiel réclamaient chacun la victoire.

 

En période normale

Conformément aux dispositions des articles 84 de la constitution et 66 de la Loi Organique sur la Cour Constitutionnelle celle-ci veille à la régularité de toutes les élections politiques et des opérations de référendum dont elle proclame les résultats. Elle veille également à la sincérité du scrutin et au respect du pluralisme.

Au regard de ces dispositions, la Cour intervient lors des opérations pré électorales, pendant le déroulement du scrutin et à l’occasion du contentieux électoral.

I. La phase pré-électorale

Il convient d’observer que même si la préparation, l’organisation et l’administration des élections incombent respectivement à l’administration, sous l’autorité du ministre chargé de l’intérieur, et à la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente, en abrégé CENAP, la Cour constitutionnelle contrôle l’exécution par chacun de ces organes des missions qui lui sont assignées.

En ce qui concerne l’Administration, dès l’ouverture de la période de révision des listes électorales par le Ministre chargé de l’Intérieur, la Cour Constitutionnelle commet des délégués pour s’assurer que les commissions administratives de révision des listes électorales ont été mises en place et que leur composition est conforme à la loi, non sans vérifier que leur fonctionnement est effectif.

Toute anomalie constatée fait l’objet d’une recommandation de la Cour adressée aux autorités administratives compétentes.

En revanche, les dysfonctionnements mineurs sont corrigés séance tenante.

A la fin du processus de révision, la Cour s’assure que les listes électorales de toutes les circonscriptions administratives sont bel et bien corrigées et établies.

Il faut, du reste, préciser que la Cour constitutionnelle est destinataire des listes électorales.

Il y a lieu de mentionner que le contentieux des inscriptions sur les listes électorales au Gabon ressortit à la compétence des tribunaux administratifs.

Pour ce qui est de la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente, il faut souligner que celle-ci est un organe autonome et permanent dont le président est désigné par la Cour Constitutionnelle et les autres membres du bureau, à parité par les partis politiques et groupements de partis politiques de la majorité et de l’opposition, le rapporteur étant quant à lui un haut fonctionnaire du Ministère de l’intérieur désigné par le Ministre en charge de ce département.

Les membres du bureau de la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente sont nommés pour un mandat de trente mois renouvelable.

Les critères de choix du président de la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente résident dans la compétence, la probité, l’intégrité morale, l’honnêteté intellectuelle, la neutralité et l’impartialité.

Il convient de souligner que lorsqu’un scrutin est en vue, aussi bien la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente que les commissions électorales locales voient leur composition complétée, d’une part, par les représentants des candidats et, d’autres part, par les représentants des familles politiques et des candidats indépendants.

S’agissant des familles politiques, leurs représentants sont désignés à parité, tandis que pour les candidats indépendants ils doivent s’organiser pour désigner un représentant.

A ce stade du processus électoral, la Cour Constitutionnelle désigne également des délégués qui sillonnent le territoire national pour vérifier que les commissions électorales ont effectivement des sièges, que leur composition est régulière et complète et que leur fonctionnement est effectif. Toutes les informations recueillies et insuffisances constatées font l’objet de recommandations de la Cour Constitutionnelle, aussi bien au Gouvernement qu’à la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente.

Pour éviter tout retard dans la prise en compte des recommandations de la Cour Constitutionnelle, celle-ci organise des séances de travail avec les différents intervenants auxquels elle impartit des délais d’exécution et exige que compte lui soit rendu de l’effectivité de la mise en oeuvre des différentes mesures arrêtées.

Par ailleurs, la Cour Constitutionnelle contrôle la conformité à la Constitution de la décision du Conseil National de la Communication relative à l’égalité de traitement des candidats dans les médias d’Etat et la répartition du temps d’antenne dans ces médias.

La Cour Constitutionnelle est également chargée d’examiner toute réclamation relative à l’éligibilité des candidats.

Le contentieux s’ouvre devant-elle dans les soixante-douze heures qui suivent la publication par la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente de la liste des candidatures que celle-ci a retenues.

La Cour Constitutionnelle, dans ce cadre, statut dans les huit jours de sa saisine.

Il faut souligner qu’à la veille de chaque scrutin, la Cour fait une déclaration publique pour rappeler les dispositions de la loi en la matière, communiquer les mesures pratiques de participation au vote, d’une part, et inviter les acteurs politiques et les citoyens à faire preuve de civisme dans l’accomplissement de leur devoir civique.

II. Le déroulement du scrutin

Deux ou trois jours avant le scrutin, la Cour Constitutionnelle déploie des délégués dans toutes les circonscriptions électorales. Ceux-ci sont chargés de vérifier in situ que le matériel électoral est disponible, que les membres des bureaux de vote sont présents, que ces bureaux de vote sont situés dans les endroits prévus par la loi, ou que la logistique nécessaire à la communication des résultats est en place.

Toute anomalie constatée à ce stade est communiquée aux membres de la Cour constitutionnelle qui font prendre toutes dispositions urgentes pour pallier ces carences.

Le jour du scrutin, les membres de la Cour Constitutionnelle assurent la permanence au siège de l’institution jusqu’à la clôture de toutes les opérations de vote afin d’apporter des réponses à toutes les situations créées sur le terrain et susceptibles d’entraver le bon déroulement du scrutin.

Après la centralisation des résultats par la commission provinciale électorale, les délégués de la Cour Constitutionnelle réceptionnent les procès-verbaux destinés à la Cour.

A l’issue de la centralisation des résultats globaux par la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente et leur annonce au public par le Ministre en charge de l’intérieur, les procès-verbaux de l’ensemble des bureaux de vote auxquels sont annexes les feuilles de dépouillement, les listes d’émargement, les différents rapports établis à différents échelons par les autorités compétentes sont transmis par la Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente à la Cour Constitutionnelle.

Dès réception de tous ces documents, la Cour Constitutionnelle procède à son tour au dépouillement, bureau de vote par bureau de vote et proclame, sous réserve du contentieux dont elle serait saisie, les résultats auxquels elle est parvenue après rectification d’éventuelles erreurs matérielles.

La décision de proclamation, en dehors du cas de l’élection présidentielle, permet aux candidats proclamés élus d’entrer aussitôt en fonction. Une fois la décision de proclamation des résultats de l’élection rendue en audience publique, les délais de saisine de la Cour Constitutionnelle commencent à courir.

Il faut souligner que ceux-ci varient selon la nature de l’élection, qu’ils sont de quinze jours pour l’élection du Président de la République, l’élection des Sénateurs et l’élection des Députés et de vingt jours pour l’élection des membres des conseils départementaux et municipaux.

III. Le contentieux électoral

En matière électorale, les audiences sont publiques et la composition de la Cour est modifiée en ce que l’un des membres exerce les fonctions du ministère public et les huit autres celles de juge du siège.

La Cour Constitutionnelle est sa1s1e dans ce cadre par les candidats, les groupements de partis politiques ou les partis politiques ayant présenté des candidats, les délégués du Gouvernement et les électeurs.

Il faut noter que les candidats ne peuvent contester que les résultats de la circonscription électorale où ils ont présenté leur candidature. Il en est de même des groupements de partis politiques et des partis politiques.

L’électeur quant à lui ne peut contester que les résultats de son bureau de vote.

Pour ce qui est des délégués du Gouvernement, il faut distinguer les compétences du Gouverneur qui se limitent à la contestation des résultats de la province dont il a la charge de celles des Ministres de la Justice et de l’Intérieur qui sont nationales.

La requête obéit à des formalités d’ordre public dont l’inobservation entraîne ipso facto l’irrecevabilité.

De même une requête introduite avant la décision de proclamation est déclarée irrecevable pour prématurité, comme celle présentée après le délai est déclarée irrecevable pour forclusion.
Chaque requête donne lieu à la désignation par le Président de la Cour Constitutionnelle d’un rapporteur. Celui-ci est chargé d’instruire le dossier.

L’instruction est, en matière électorale, effectuée de manière contradictoire.

A l’issue de l’instruction, le rapporteur dresse un rapport dont il donne lecture à l’audience publique.

Il faut dire que la Cour a un délai pour le jugement des affaires qui varie d’un à quatre mois selon le type d’élection.

La procédure étant essentiellement écrite, les plaidoiries ne sont pas admises lors des audiences publiques. Toutefois, les parties ou leurs conseils ont la faculté de faire quelques observations orales après la présentation des rapports, de même qu’ils peuvent présenter des notes en délibéré.

Les causes d’annulation d’une élection sont de deux ordres, à savoir, les causes facultatives et les causes péremptoires.

La Cour Constitutionnelle peut, soit valider, soit annuler l’élection contestée, soit reformer le résultat et proclamer élu un autre candidat. L’annulation peut être totale ou partielle.

Une annulation partielle peut conduire à l’annulation totale du scrutin lorsque la Cour Constitutionnelle estime que la sincérité du scrutin se trouve altérée par la non prise en compte des résultats de certains bureaux de vote.

Par ailleurs, lorsque la Cour estime un recours abusif, elle peut infliger au requérant une amende dont le montant varie entre cent mille et un million de francs CFA.

Il importe de prec1ser pour terminer sur cette partie relative au contentieux de l’élection que les recours n’ont pas un effet suspensif, sauf comme nous l’avons déjà dit plus haut, en ce qui concerne l’élection du Président de la République qui doit attendre la fin du contentieux électoral avant de prêter serment pour entrer en fonction.

 

La répartition des compétences entre la Haute Cour Constitutionnelle et la Commission Électorale Nationale indépendante (CENI) pendant la période de transition à Madagascar

 

Madame la Secrétaire Générale,
Mesdames et Messieurs les participants, représentant des Cours
Constitutionnelles membres de l’ACCPUF,

C’est avec un grand honneur que la délégation malgache participe de nouveau aux travaux de l’ACCPUF après une période d’absence due à des causes d’ordre interne qu’il échet d’appréhender de la manière la plus objective.

D’emblée, nous tenons à vous exprimer notre réelle volonté de toujours nous impliquer dans les travaux de I’ACCPUF afin de pouvoir procéder à des échanges de pratiques positives, pour un avenir toujours meilleur.

Le thème choisi par l’ACCPUF nous parait d’actualité puisque Madagascar, qui se trouve actuellement dans une période de transition, est en train d’organiser un référendum constitutionnel suivi d’élections à tous les niveaux.

En effet, ces mesures ont été estimées nécessaires pour raccourcir la période de transition, en vue d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel bouleversé par la crise traversée par le pays.
A l’heure actuelle, les organes directement concernés par les élections à Madagascar sont la Haute Cour Constitutionnelle et la Commission Electorale Nationale Indépendante nouvellement instituée.

I- Sur la Haute cour constitutionnelle :

Les textes régissant la transition à Madagascar maintiennent encore la Haute Cour Constitutionnelle dans sa formation actuelle et qui exerce ses fonctions jusqu’à l’avènement de la IVe République.

Le point essentiel, dans ce cadre, demeure le maintien et la reconnaissance du droit de recours en matière électorale, ce que confirme d’ailleurs le nouveau code électoral (ordonnance n°2010-003 du 23 mars 2010 portant loi organique relative au code électoral, modifiée et complétée par l’ordonnance n°2010-007 du 7 octobre 2010 et par l’ordonnance n°20l0-·011 du 10 novembre 2010).
Aux termes de l’article 130 dudit code, la Haute Cour Constitutionnelle est juge en premier et dernier ressort de toute requête contentieuse relative au référendum, à l’élection du Président de la République et aux élections législatives et sénatoriales. Elle est chargée, en outre, d’en proclamer les résultats définitifs.

II – Sur la Commission électorale nationale indépendante (CENI) :

Une conférence nationale a été organisée à Antananarivo, capitale de Madagascar, à partir du 13 septembre 2010. Cette conférence réunissait une large participation des représentants des forces vives de la nation qui ont pu entériner la nécessité de la mise en place de la CENI.

Conformèrent aux pratiques positives vécues en d’autres lieux et aux exigences inscrites dans les relations internationales, de telle commission devra répondre au moins à trois critères :

– Sur le plan organisationnel et fonctionnel, la garantie de l’impartialité de la Commission, par la détermination de ses pouvoirs propres excluant l’intervention de l’administration.

– Sur le plan individuel, la protection de ses membres au cours de l’exercice de leurs fonctions;

– Sur le plan financier, la garantie d’une autonomie et de la possibilité de recourir à de sources de financement autres que celles de l’Etat.

A – Les attributions de la CENI :

La CENI (application combinée du code électoral et du décret n°2010-142 fixant son organisation, son fonctionnement et ses attributions) est chargée en général, de gérer, d’organiser et de superviser les opérations électorales et le référendum. Rentrent dans ce cadre le respect de la législation électorale, l’éducation nationale, la publication des résultats provisoires. La CENI demeure le garant moral de l’authenticité des scrutins et peut déléguer ses pouvoirs à ses démembrements sur tout le territoire national.

Sur le plan pratique; la CENI exerce des attributions précises avant, pendant et après le scrutin.

Avant le scrutin, elle est chargée notamment de l’établissement des listes et des cartes électorales, de la formation du personnel du scrutin, de la sensibilisation et de l’éducation des citoyens, de la réception, du traitement et de l’enregistrement des candidatures, de la publication des listes des candidats, de l’acheminement des matériels électoraux jusqu’aux bureaux de vote, de la désignation des membres des bureaux de vote, de la délivrance de agréments aux observateurs des élections, de la répartition du temps d’antenne à la radio et télévision nationales.

Pendant le scrutin, la CEN I veille au bon déroulement des opérations de vote, assure l’application des dispositions législatives et réglementaires, procède à l’affichage des résultats dans chaque bureau de vote.

Après le scrutin, il incombe à la CENI de transporter les documents électoraux et de transférer les résultats en vue de leur centralisation, de traiter tes dossiers électoraux et d’en proclament provisoirement les résultats.

Il importe de relever qu’auparavant, ces attributions relevaient de la compétence de l’Administration territoriale, Le désengagement de l’Administration doit être ainsi considéré comme une garantie de sa neutralité.

B – la composition de la CENI :

La CENI est composée de 19 membres issus de la société civile, des sensibilités politiques et de l’Administration. La société civile s’y trouve majoritaire avec 10 représentants, elle est suivie des sensibilités politiques avec 7 représentants incluant les partis d’opposition, l’Administration y est minoritaire avec seulement 2 représentants.

Pour cause d’incompatibilité, ne peuvent être admis comme membres de la CENI : les membres des institutions, ceux nommés aux hauts emplois de l’Etat, les candidats aux élections, les éléments des forces armées ainsi que les fonctionnaires d’autorité civile et militaire.

La CENI est dirigée par un bureau composé d’un Président, d’une Vice-président et d’un rapporter général, élus par ses pairs pour un mandat de 5 ans non renouvelable.

Les membres de la CENI bénéficient d’une protection spéciale dans l’exercice de leurs fonctions car, en effet, sauf le cas de flagrant délit, ils ne peuvent être poursuivis, recherchés, arrêtés, détenus ou jugés pour des opinions exprimées ou des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions.

C – les dispositions financières sur la CENI

Dans le contexte actuel de la Transition à Madagascar, la communauté internationale jusqu’à ce jour, n’a pas encore exprimé sa volonté de contribuer financièrement à la réalisation des opérations électorales à Madagascar.

Toutefois, les pouvoirs politiques sont incessamment : tenus à veiller à la continuité de l’État et à procéder au retour à l’ordre constitutionnel. C’est ainsi que la CENI bénéficie d’une dotation de crédits sur le budget général de l’État pour son fonctionnement et d’une dotation spéciale pour chaque élection.

Il n’en demeure pas moins que pour assurer l’indépendance et l’efficacité de la CENI, celle-ci n’est pas soumise au code des marchés publics et au contrôle des dépenses engagées et surtout, les textes existants lui permettent de rechercher des sources de financement autres que celles de l’État.

III – Les pouvoirs propres de la CENI et ses rapports avec les juridictions compétentes en matière électorale

La CENI, dans l’exercice de ses fonctions, a le pouvoir de saisir les juridictions et dans ce cas, de se substituer aux électeurs afin de présenter toute requête relative aux opérations électorales.

Préalablement à la saisine des juridictions, la CENI peut être saisie par un candidat ou liste de candidats ou par leurs délégués concernant les infractions commises par un autre candidat, par un membre de bureau de vote ou par les responsables de l’Administration.

La CENI, pour des questions urgentes, peuvent, après mise en demeure infructueuses des responsables des élections, dessaisir ces derniers de leurs fonctions et se substituer à eux et même proposer devant le conseil de discipline de la fonction publique tout fonctionnaire faisant obstacle à l’application de la législation électorale en vigueur.

En conclusion, nous sommes en droit de déclarer que Madagascar n’est pas resté insensible aux échanges positifs au sein de l’ACCPUF, au sein de l’OIF. En ce sens, la pratique du bulletin unique en matière électorale est désormais admise dans notre législation et même en période transitoire et ce, surtout ·en respect du principe d’égalité des candidats.

A l’heure actuelle, le cas de Madagascar ne peut être considéré comme un cas isolé devant faire l’objet d’études très spécifiques. L’essentiel est de se convaincre que la stabilité politique ne peut être maintenue tant que perdure la velléité de pratique dictatoriale rentrant en violation des règles démocratiques.

Le retour à l’ordre constitutionnel requiert la reconsidération de l’ordonnancement juridique interne et de l’organisation de l’État bouleversés. Les règles relatives aux organes chargés des élections méritent d’être revisitées pour que ceux-ci constituent des instruments contribuant à l’assurance d’une paix sociale durable.

 

Le fonctionnement de la Cour constitutionnelle du Mali en période électorale

par Fatoumata Diall, conseiller

I. Phase préparatoire des élections :

• Élaboration du budget :

Cette phase d’évaluation de l’incidence financière des élections se fait au cours d’une réunion présidée par le Président de la Cour et regroupant les Conseillers, le Gestionnaire et le Régisseur de la Cour. Le document élaboré à cet effet prend en compte :

  • le transport des Conseillers et des délégués (location de véhicules et carburant) ainsi que l’hébergement ;
  • les fournitures de bureau ;
  • les frais de restauration pendant la période de traitement des documents électoraux ;
  • les indemnités des Conseillers, des agents de sécurité, des délégués et du personnel d’appui chargé de la permanence ;
  • le traitement informatique des résultats.

• Choix et formation des délégués :

Les jeunes retenus pour l’observation des élections sont soit des auditeurs de justice, soit des jeunes diplômés (bac+ 4).

Quelques jours avant les élections ils sont soumis à une formation sur :

  • la Constitution ;
  • la loi électorale ;
  • les irrégularités et autres causes d’invalidation des votes (cartes d’électeur, urnes, isoloirs, etc.).

Un aide-mémoire leur est remis qui constitue le guide pour les activités sur le terrain. L’aide-mémoire énumère de façon claire et précise tous les documents devant se trouver dans un bureau de vote ainsi que la chronologie des opérations de vote.

Le délégué garde le contact avec le siège de la Cour ou avec les membres de la Cour qui évoluent dans sa zone.

Pour les élections législatives et présidentielles de 2007, 2000 délégués ont été déployés sur le terrain. Ils sont d’un apport inestimable pour l’éclairage de la Cour.

• Secrétariat Général :

Il constitue le niveau de coordination de l’ensemble des activités administratives et juridictionnelles de l’institution.

Entre autres, le Secrétariat Général veille :

  • à la réception, à l’enregistrement et à la distribution avec l’urgence requise, du courrier relatif à l’évènement électoral ;
  • à la saisie et à la transmission, avec la même diligence, des correspondances relatives aux élections ;
  • à l’organisation des programmes de sélection, de formation et de déploiement des délégués de la Cour Constitutionnelle chargés de l’observation sur place du scrutin ;
  • à assurer l’organisation matérielle pour le bon déroulement des réunions de la Cour ;
  • au suivi des relations avec les démembrements et organisation impliqués dans la mise en oeuvre du processus électoral.

• Greffe :

Maillon indispensable dans le fonctionnement juridictionnel de la Cour, le Greffe s’emploie à ce stade à ouvrir ou à mettre en état les différents registres et répertoires nécessaires à l’enregistrement des éventuelles requêtes, des documents électoraux, au traitement des décisions de la Cour ainsi qu’à la distribution interne et externe des actes.

 

Il. Le jour du scrutin :

Une permanence est assurée par l’ensemble du Service administratif et du greffe en période électorale.

 

Ill. La phase post-électorale :

Une permanence générale est mise en place pour les actions ci-après :

• Secrétariat Général :

  • Réception et transmission aux Conseillers des rapports des délégués ;
  • Réception et transmission au Greffe des requêtes ;
  • Soutien au Greffe dans la gestion des procès-verbaux et documents annexes issus des bureaux de vote ;
  • Soutien à la société chargée du traitement informatique des résultats;
  • Organisation des audiences de proclamation des résultats ;
  • Transmission des copies des décisions à leurs destinataires (Président de la République, Président de l’Assemblée Nationale, Premier Ministre, Secrétaire Général du Gouvernement pour publication au Journal Officiel) ;
  • Mise en oeuvre du plan de couverture de l’évènement par l’ensemble des médias.

• Greffe:

  • La réception et la transmission aux Conseillers des procès-verbaux et documents annexes issus des bureaux de vote ;
  • La réception, l’enregistrement et la ventilation des requêtes ;
  • La saisie des projets de décision de la Cour ;
  • L’assistance de la Cour dans les délibérations et les audiences ;
  • La correction des projets de décisions (sous la supervision du Conseiller rapporteur) et la mise à la disposition des usagers des expéditions ;
  • Et enfin l’archivage des procès-verbaux et les documents annexes.

IV. Traitement informatique des dossiers :

Au fur et à mesure de l’examen des documents électoraux par les Conseillers ils sont envoyés en salle d’informatique.

Le document issu du traitement informatique contient les indications suivantes :

  • La région ;
  • le cercle ;
  • la commune concernée ;
  • le N° du bureau de vote ;
  • le nombre d’électeurs inscrits ;
  • le nombre de votants ;
  • le nombre de bulletins invalidés ;
  • les suffrages valablement exprimés ;
  • le taux de participation.

Un autre tableau contient le nombre de suffrages obtenus par liste ou par candidat et enfin, le service informatique établit un diagramme des résultats.

V. Sécurité de la Cour en période électorale :

En période électorale, la sécurité de la Cour est particulièrement renforcée. L’accès de personnes étrangères à la Cour est filtré et des gardes de corps sont affectés aux différents membres de la Cour.

 

Le fonctionnement de la Cour constitutionnelle de Moldavie en période électorale

par Maia Banarescu, secrétaire générale

Le 29 juillet 1994 est adoptée la Loi fondamentale de l’État – la Constitution de la République de Moldova.

La création de la Cour constitutionnelle en République de Moldova représente une innovation de la Constitution du 1994, puisqu’en l’absence d’une telle institution la Constitution n’a qu’une importance symbolique. La suprématie de la Loi fondamentale, l’une des prémisses de l’État de droit, est garantie par la Cour constitutionnelle au moyen du contrôle de constitutionnalité des lois, dans le cas où le pouvoir législatif ou exécutif ne respecte pas les normes constitutionnelles.

La Cour constitutionnelle est l’unique autorité de juridiction constitutionnelle dans la République qui garantit la suprématie de la Constitution, assure la réalisation du principe de la séparation du pouvoir d’Etat en pouvoir législatif, exécutif et judiciaire et garantit la responsabilité de l’État devant le citoyen et du citoyen devant l’État (article 134 de la Constitution).

La Constitution, la Loi sur la Cour constitutionnelle et la Code de la juridiction constitutionnelle statuent expressément les attributions de la CC, les personnes ayant le droit de saisir la CC, l’objet et la modalité de saisir la CC.

La Cour constitutionnelle exerce la juridiction constitutionnelle sur saisine des autorités suivantes: le Président de la République, le gouvernement, le ministre de la Justice, la Cour suprême de justice, la Cour économique, le procureur général, le député du Parlement, une fraction parlementaire, l’avocat parlementaire, l’Assemblée populaire de Gagaousie (Gagaouse-Yeri) et la Commission électorale centrale.

La Cour constitutionnelle exerce sur saisine le contrôle de constitutionnalité des lois et des arrêtés du Parlement, des décrets du Président de la République, des arrêtés et ordonnances du gouvernement, ainsi que des traites internationaux auxquels la République de Moldavie est partie; interprète la Constitution; se prononce sur les initiatives de révision de la Constitution; confirme les résultats des rcferendums républicains; confirme les résultats des élections du Parlement et du président de la République ; constate les circonstances justifiant la dissolution du Parlement, la destitution du Président de la République, l’intérim de la fonction de président, l’impossibilité du président de la République d’exercer ses attributions plus de 60 jours; statue sur les exceptions d’inconstitutionnalité des actes juridiques transmis par la Cour suprême de justice; décide sur les problèmes concernant la constitutionnalité d’un parti.

Les sujets ayant le droit de saisir la CC sur des questions concernant leurs compétence, à l’exception de la révision de la Constitution qui peut être engagée à l’initiative d’un nombre d’au moins de 200.000 citoyens de la République de Moldova ayant le droit de vote / d’un tiers au moins du nombre des députés du Parlement / du Gouvernement. La constatation des circonstances justifiant la dissolution du Parlement peut être sollicitée sur saisine du Président, en temps que la constatation des circonstances justifiant la destitution du Président de la République ou l’intérim de la fonction de Président peut être sollicitée sur saisine du Parlement, sur la base de l’arrêté du Parlement, signé par le Président de la République. La saisine concernant la constitutionnalité d’un parti peut être présentée par le Président de la République, le Président du Parlement, le gouvernement, le ministre de la Justice ou le procureur général. Le Président du Parlement peut saisir la CC uniquement en base d’un arrêté du Parlement, le Procureur général – en base d’une décision du collège du Parquet, le ministre de la justice – en base d’une décision du collège du Ministère de la Justice.

L’Assemblée populaire de Gagaousie (Gagaouse-Yeri) peut saisir la CC exclusivement au cas où sont soumis au contrôle de constitutionnalité les lois, les règlements et les arrêtés du Parlement, les décrets du Président de la République, les arrêtés et les ordonnances du gouvernement, ainsi que les traités internationales auxquels la République de Moldavie est partie qui restreignent les pouvoirs de Gagaousie.

L’avocat parlementaire saisit la CC en vue du contrôle de constitutionnalité, de concordance des normes constitutionnelles, des principes généralement reconnus et des actes internationaux sur les droits de l’Homme, des lois et des arrêtés du parlement, des décrets du Président de la République, des arrêtés et des dispositions du gouvernement qui empo1ient violation des droits et des libertés constitutionnelles.

La Commission électorale centrale, comme sujet ayant le droit de saisir la CC, s’adresse pour la confirmation des résultats des élections du Parlement, du Président de la République et des referendums républicains en base du rapport présenté. En outre, la Commission électorale centrale présente le dossier relatif à la déclaration du candidat suppléant en fonction de député au parlement.
Dans un délai de 10 jours après la réception des documents de la Commission électorale centrale, mais pas avant la solution définitive par les instances judiciaires sur des contestations remises selon la procédure légale, la CC confirme ou infirme par avis la légalité des élections. En même temps, la CC valide les mandats des députés élus et confirme les lestes des candidats suppléants (article 89 du Code électoral).

Par conséquent, les attributions de la Cour constitutionnelle en matière électorale consistent en confirmer/infirmer les résultats des élections, se basant sur les documents présentés par la Commission électorale centrale, dans les 48 heures qui suivent la proclamation des résultats définitifs du scrutin.

 

Les prérogatives de la Cour constitutionnelle de la Roumanie dans la procédure d’élection du Président roumain

par Fabian NICULAE, Magistrat-assistant

En Roumanie, La Cour Constitutionnelle est le garante de la suprématie de la Constitution, tout en étant l’unique autorité de juridiction constitutionnelle.

Elle a des compétences importantes dans le cadre des élections présidentielles, des compétences prévues par la Constitution dans son article 146 lett.f), par sa Loi d’organisation et fonctionnement[1] et la Loi sur l’élection du Président de la Roumanie[2]. Ainsi, la Constitution prévoit que la Cour veille au respect de la procédure d’élection du Président de la Roumanie et confirme les résultats du suffrage. Le résultat des élections pour la fonction de Président de la Roumanie est validé par la Cour constitutionnelle.

Les contestations relatives à l’enregistrement ou au non-enregistrement de la candidature à la fonction de Président de la Roumanie, ainsi que celles concernant les entraves mises à un parti ou à une formation politique ou à un candidat de dérouler sa campagne électorale dans les conditions de la loi sont tranchées par la Cour constitutionnelle, à la voix de la majorité des juges, dans les délais prévus par la loi pour l’élection du Président de la Roumanie.

La compétence la plus importante est celle qui lui permet d’annuler les élections à cause d’une fraude électorale. Selon l’article 24 de la Loi sur l’élection du Président de la Roumanie, la Cour constitutionnelle peut annuler les élections le cas où la votation et établissement des résultats ont été faits par le biais d’une fraude de nature à vicier l’attribution du mandat, ou, selon le cas, l’ordre des candidats en droit de se présenter au second tour des élections. Dans une telle situation, la Cour va disposer la répétition des élections le deuxième dimanche suivant la date d’annulation des élections.

La requête d’annulation des élections peut être introduite par les partis et les candidats ayant participé aux élections, dans un délai de 3 jours suivant la clôture de la votation ; la requête doit être motivée est doit être accompagnée des preuves pertinentes.

La Cour constitutionnelle confirme le résultat de chaque tour de scrutin, assure la publication des résultats des élections dans les médias et au Journal Officiel (Monitorul Oficial) de la Roumanie, Partie 1ère, pour chaque tour de scrutin et valide le résultat des élections pour le Président élu.

L’acte de validation est rédigé en 3 exemplaires, dont un reste à la Cour constitutionnelle, l’un est transmis au Parlement pour que le Président élu puisse prêter serment et le troisième exemplaire est transmis au candidat élu.

Jusqu’à présent, la Cour a veillé au déroulement de 5 élections présidentielles.

Les dernières élections de 2009 (le 22 novembre et le 6 décembre) ont connu des éléments inédits. Suite à des plaintes introduites par le Parti Social Démocrate dont le candidat invoquait des fraudes massives, la Cour a disposé, pour la première fois, que le Bureau électoral central recompte les bulletins de vote. Suite à cette opération, la Cour a confirmé le résultat initial.

Le point central de la plainte était lié au fait que, durant les élections, il a eu un nombre invraisemblablement grand des citoyens roumains ayant voté à l’étranger. La Cour a décidé dans son Arrêt n° 39 du 14 décembre 2009 que l’existence d’un grand nombre d’électeurs qui se sont présentés au vote à l’étranger ou qui ont voté aux sections spéciales, ainsi que les pourcentages obtenus par les deux candidats à l’étranger, par rapport à ceux obtenus sur le territoire national ne sont pas de nature à tirer la conclusion qu’il y a eu une fraude. Ces différences peuvent mettre an discussion l’option politiques des électeurs et non la légalité du vote exprimé par ceux-ci.

La Cour a pris soin de rappeler qu’on ne peut pas mettre le signe d’égalité entre toute fraude qui apparaît durant le processus électoral et la fraude des élections, il faut que cette fraude soit de nature à vicier l’attribution du mandat.

Dans le même Arrêt, la Cour a souligné la nécessité d’avoir un nouveau code électoral adopté par le Parlement, code qui écarte toute disposition qui est de nature à conduire à l’apparition des doutes concernant le processus électoral.

On peut conclure en disant que les élections présidentielles naissent toujours des passions au sein de la société roumaine, des passions qui sont apaisées par la Cour constitutionnelle, une cour qui essaie de ne pas se laisser toucher par ces fortes passions.


  • [1]
    1 Loi n°47/1992 concernant l’organisation et le fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, republiée au Journal officiel (Monitorul Oficial) de la Roumanie, Partie Ière, n°502 du 3 juin 2004, les articles 37-38  [Retour au contenu]
  • [2]
    Loi n°370/2004 sur l’élection du Président de la Roumanie, publiée au Journal officiel (Monitorul Oficial) de la Roumanie, Partie 1ère, n°887 du 29 septembre 2004  [Retour au contenu]

 

La protection du droit électoral devant la cour constitutionnelle de Serbie

par Bosa Nenadic, Docteur en droit, présidente de la Cour constitutionnelle de la République de Serbie et Nikola Djekic, conseiller à la Cour constitutionnelle de la République de Serbie

Résumé

La protection du droit électoral devant la Cour constitutionnelle de Serbie apparaît sous trois formes fondamentales : premièrement, en tant que protection indirecte dans le cadre des procédures d’examen de la constitutionnalité des lois, ou de la constitutionnalité et de la légalité des autres actes juridiques généraux régissant le droit électoral ; deuxièmement, en tant que protection directe dans le cadre des décisions sur les contentieux électoraux ne relevant pas de la compétence des juridictions ordinaires ; troisièmement, en tant que protection directe dans le cadre des procédures de recours constitutionnel engagé par un sujet de droit dont une liberté ou un droit garanti par la Constitution a été méconnu par un acte ou une action individuel d’un organe de l’Etat ou d’un organisme public qui a statué sur ses droit et ses obligations.

La singularité de l’ordre juridique de Serbie s’agissant la protection judiciaire du droit électoral est l’absence de sa protection en cas de cessation de mandat réalisé des députés à l’assemblée nationale et aux assemblées locales. L’introduction du recours constitutionnel dans l’ordre juridique serbe par la Constitution de 2006, en tant que dernier voie de recours efficace de protection des droits et des libertés fondamentales, a ouvert la voie à la Cour constitutionnelle à une activité offrant une protection intégrale du droit électoral, dans la situation que la protection de ce droit fait défaut devant les juridictions ordinaires ou administratives et les autres autorités étatiques. Malgré le fait que la compétence de la Cour constitutionnelle de Serbie de statuer sur les contentieux électoraux est subsidiaire (les contentieux électoraux n’entrant pas dans la compétence des autres juridictions) et réduite aux seules violations du droit électoral commises durant la procédure électorale, le fait que les formules légales existantes n’assurent pas la protection juridique à tous les aspects du droit électoral engage la Cour constitutionnelle d’assurer désormais, en statuant sur les recours constitutionnels, la protection de tous les aspects de ce droit, et particulièrement en cas de cessation du mandat des députés. La Cour constitutionnelle de Serbie doit statuer en ce moment sur une dizaine de recours constitutionnels relevant de la cessation des mandats obtenus aux élections.

 

1. Introduction

En raison de son caractère et de son importance le droit électoral est exposé aux fréquentes violations, de sorte qu’il est nécessaire de définir et d’assurer au droit électoral proclamé par la Constitution une protection juridique adéquate par les juridictions et les autres autorités d’État. Les violations du droit électoral dans la réalité sociale de la République de Serbie ont été fréquentes dans la période écoulée en dépit de la protection de ce droit proclamée par la Constitution. Ces violations étaient commises par différents sujets dont le pouvoir exécutif et l’appareil administratif, les partis politiques et autres détenteurs du pouvoir politique, la majorité parlementaire, les médias etc. Le fait que ces violations interviennent dans la pratique demande la mise en place d’une protection appropriée du droit électoral. Cependant, ce qui caractérise le système juridique de la République de Serbie s’agissant la réalisation de la protection du droit électoral, c’est l’absence d’une régulation juridique intégrale et cohérente du droit électoral de sorte que certains aspects de ce droit sont restés sans protection. Nous tâcherons dans le présent texte de faire ressortir le rôle de la Cour constitutionnelle en matière de la protection juridique intégrale du droit électoral en République de Serbie, plus précisément, les situations où cette protection juridique est réalisable devant la Cour constitutionnelle.

2. La protection du droit électoral devant la Cour constitutionnelle de Serbie

S’agissant de la protection du droit électoral devant la Cour constitutionnelle de Serbie, cette protection apparaît sous trois formes fondamentales : premièrement, en tant que protection indirecte dans le cadre des procédures d’examen de la constitutionnalité des lois, ou de la constitutionnalité et de la légalité des autres actes juridiques généraux régissant le droit électoral ; deuxièmement, en tant que protection directe dans le cadre des décisions sur les contentieux électoraux ne relevant pas de la compétence des juridictions ordinaires ; troisièmement, en tant que protection directe dans le cadre des procédures de recours constitutionnel engagé en cas de violation ou de privation des droits de l’homme ou des minorités et des libertés garantis par la Constitution. L’action engagée devant la Cour constitutionnelle sur la constitutionnalité des lois, ou sur la constitutionnalité et la légalité des autres actes juridiques régissant le droit électoral est effectivement une forme de protection juridique du droit électoral, mais ne représente pas un contentieux électoral.[1] De même, la décision sur le recours
constitutionnel à propos d’une violation du droit électoral ne représente pas non plus un contentieux électoral, mais une forme de protection directe des droits du citoyen garantis par la Constitution (et, dans ce cadre, du droit électoral aussi).

En plus de sa compétence fondamentale, celle d’examiner la constitutionnalité et la légalité des actes généraux (des lois et des autres règlements régissant le mode de réalisation du droit électoral), la Cour constitutionnelle de Serbie, en vertu de l’article 167, paragraphe 2, point 5 de la Constitution de la République de Serbie[2] décide aussi des „contentieux électoraux pour lesquels la compétence des autres juridictions n’est pas définie par la loi“. Vu la façon dont la Constitution définit la compétence de la Cour constitutionnelle en matière de règlement des contentieux électoraux, il en découle que, en règle générale, ce sont les juridictions ordinaires ou administratives ou les autres autorités d’État qui tranchent les contentieux électoraux, sauf quand certains contentieux électoraux n’ont pas été établi comme relevant de la compétence de ces autorités auquel cas ils reviennent à la compétence de la Cour constitutionnelle. Donc, l’autorité constituante a choisi que les tribunaux réguliers et les autres juridictions étatiques décideraient en premier lieu sur les contentieux électoraux, et que la Cour constitutionnelle possède en cette matière une compétence subsidiaire c’est à- dire la compétence de décider sur les contentieux électoraux ne relevant pas aux termes de la loi de la compétence des autres autorités d’État.[3]

La Loi sur la Cour constitutionnelle définit la procédure de décision de la Cour constitutionnelle de Serbie en matière des contentieux électoraux pour lesquels une compétence des tribunaux n’est pas définie [4]. Cette Loi définit les sujets à légitimation active ayant la capacité d’engager un contentieux électoral, les délais de présentation des requêtes, l’effet juridique des décisions de la Cour constitutionnelle, ainsi que la procédure de recours contre la décision sur la confirmation des mandats des députés. En définissant ainsi le cercle des personnes à légitimation active dans le cadre de cette procédure devant la Cour constitutionnelle, le législateur a choisi aussi, indirectement, le type (le contenu) des contentieux électoraux pouvant être engagés devant la Cour constitutionnelle. Les contentieux électoraux ne peuvent être engagés devant la Cour constitutionnelle, dans les conditions fixées par la loi, qu’en vue de la protection du droit électoral visé à l’article 52 de la Constitution, réalisé au scrutin direct, et cela en raison des irrégularités intervenues au cours de la procédure d’élection (depuis le moment de la convocation jusqu’à l’achèvement de la procédure électorale). Par conséquent, les contentieux pouvant surgir en relation avec la protection du droit réalisé, c’est-à-dire du mandat obtenu au scrutin direct ou en raison des violations du droit commises dans le cadre de la procédure d’élection ou de révocation à l’Assemblée nationale, ne relèvent pas de la compétence de la Cour constitutionnelle. Donc, la compétence de la Cour constitutionnelle ne couvre que les contentieux surgissant au cours de la procédure électorale où le droit électoral est réalisé au scrutin direct, ou au cours de la réalisation des élections pour les députés à l’Assemblée nationale, les députés locaux et pour le président de la République – bien entendu, à condition que ces contentieux ne relèvent pas de la compétence des autorités chargées de la mise en oeuvre du scrutin (bureaux de vote et commissions électorales) et des tribunaux. Aussi peut-on constater sans hésiter que la disposition de l’article 75 de la Loi sur la Cour constitutionnelle réduit le champ des compétences de la Cour constitutionnelle fixé par la Constitution en matière de protection du droit électoral, se résumant à la seule décision sur les contentieux surgissant au cours de la procédure électorale, bien que la Constitution stipule que la Cour constitutionnelle décide sur „les contentieux électoraux“.[5]

Jusqu’à présent la pratique de la Cour constitutionnelle de Serbie en matière de protection du droit électoral moyennant les contentieux électoraux a été caractérisée par une certaine «hésitation» de cette Cour de se dire compétente pour statuer sur les contentieux électoraux. Depuis 1990 la Cour constitutionnelle s’est trouvée à plusieurs reprises en situation de statuer sur les requêtes en règlement des contentieux électoraux, mais déclarait, en règle générale, que ces contentieux ne relevaient pas de sa „compétence réelle“.[6]

Une autre forme de protection directe du droit électoral devant la Cour constitutionnelle de Serbie est assurée dans le cadre de la procédure de recours constitutionnel. Le recours constitutionnel a été introduit dans l’ordre juridique de la Serbie par la Constitution de 2006, comme un moyen juridique subsidiaire pouvant être déclaré contre les actes ou actions individuels des organes d’État ou des organisations auxquelles ont été confiés des pouvoirs publics (organismes publics), violant ou refusant des droits de l’homme ou des minorités ou des libertés garantis par la Constitution, si les autres moyens juridiques de leur protection se trouvent épuisés ou inexistants.

La Constitution de 2006 a étendu la protection du droit électoral devant la Cour constitutionnelle uniquement sur les irrégularités relevant la vérification des mandats des députés. Mais un aspect fondamental du droit électoral – la protection du droit électoral acquis au scrutin direct – est resté en dehors de la compétence non seulement de la Cour constitutionnelle, mais de celle des autres juridictions aussi. En effet, le législateur n’a pas assuré au mandat réalisé du député une protection judiciaire en cas de sa cessation. Or c’est précisément dans la protection juridique de cet aspect du droit électoral que nous voyons un champ d’activité de la Cour constitutionnelle de Serbie, qui ne tardera pas de s’affirmer dans la période à venir.

Nous sommes d’avis que comme contentieux électoraux doivent être considérés non seulement les contentieux en matière de protection du droit électoral durant le processus d’élection des organes du pouvoir, personnalisées au scrutin direct, mais aussi de protection du droit électoral réalisé au scrutin direct, ainsi que les contentieux survenus en raison des irrégularités intervenues dans le cadre de la procédure d’élection et de révocation relevant, aux termes de la Constitution, de l’Assemblée nationale[7].

Les lois régissant les élections des organes du pouvoir se personnalisant au scrutin direct règlent le mode de réalisation du droit électoral dans le cadre de la procédure de l’élection de ces organes et la procédure de protection du droit électoral devant les organes chargés de la mise en oeuvre des élections et devant les tribunaux. L’analyse de notre législation positive fait ressortir que le législateur (mais non l’autorité constituante) n’a défini comme contentieux électoraux que les contentieux relevant de la protection du droit électoral, et cela au cours des élections aux organes représentatifs et autres organes se personnalisant au scrutin direct. Cependant, la question se pose, et à bon escient, de savoir si cette conception du contentieux électoral par notre législateur est conforme aux principes constitutionnels de protection des droits et des libertés constitutionnels, et dans ce cadre du droit électoral aussi, et si cela veut dire que la Constitution garantit uniquement le seul droit électoral en tant que droit électoral au cours de la procédure électorale, et non la protection du droit électoral dans son ensemble en tant que droit unique indépendamment des formes et des aspects de sa manifestation. Donc, notre législateur actuel n’a pas assuré la protection judiciaire au droit électoral dans sa totalité, en dehors de cette protection restant en premier lieu le mandat réalisé des députés à l’assemblée nationale et aux assemblées locales.

La question se pose aussi de savoir quel serait le rôle de la Cour constitutionnelle de Serbie en cas d’absence du droit à la protection juridique du droit électoral réalisé. Partant du fait que dans le système juridique de la République de Serbie doit être garantie la protection judiciaire des droits de l’homme et des minorités, garantis par la Constitution, de sorte qu’en cas du droit électoral sa protection pourrait, en dernière instance, être assurée devant la Cour constitutionnelle. Reste à savoir si cette protection devant la Cour constitutionnelle serait assurée par un contentieux électoral ou par un recours constitutionnel. La Cour constitutionnelle pourrait en tout cas trouver un fondement pour sa compétence en matière des contentieux électoraux en cas de cessation de mandat des élus, car dans ces cas nulle autre protection juridique n’est assurée. Cependant, partant du fait que la Constitution précise que le recours constitutionnel peut être engagé par un sujet de droit dont une liberté ou un droit fondamental garanti par la Constitution a été méconnu par un acte ou une action individuels d’un organe de l’Etat ou d’un organisme public qui a statué sur ces droits et obligations, et dans ce cadre le droit électoral aussi, et dans la situation où aucun autre voie de recours n’est prévu en vue de leur protection, la protection du mandat d’élu réalisé devrait indubitablement être assurée dans le cadre de la procédure de recours constitutionnel devant la Cour constitutionnelle[8].

La Cour constitutionnelle est souvent saisie pour statuer sur les recours constitutionnels en vue de la protection du droit électoral, en premier lieu des élus des autonomies locales contestant les décisions des juridictions ordinaires ou administratives prononcées contre les décisions des assemblées des autonomies locales. Jusqu’à présent la Cour constitutionnelle a dû rejeter un certain nombre de ces recours dans le cadre du contrôle préalable, en absence des conditions processuelles requises. Cependant, la Cour constitutionnelle de Serbie doit statuer en ce moment sur une dizaine de recours constitutionnels relevant de la cessation des mandats obtenus aux élections. Dans ces cas la Cour constitutionnelle va se prononcer sur le fond et statuera sur la régularité de la cessation du mandat des élus, pour compléter ainsi la protection juridique du droit électoral passif visé à l’article 52 de la Constitution, dans la situation où celle-ci n’est pas assurée devant les tribunaux réguliers.

3. Avis conclusif

Vu ce qui précède, nous pourrions conclure que la décision sur les contentieux électoraux représente une des compétences existantes de la Cour constitutionnelle de Serbie qui ne s’est pas affirmée jusqu’à présent, mais qui reste ouverte aussi aux diverses interprétations et controverses. La pratique de la protection du droit électoral devant la Cour constitutionnelle a été souvent marquée par les déclarations de non-compétence de la Cour constitutionnelle pour les contentieux engagés en vue de la protection du droit électoral. Cependant, l’introduction du recours constitutionnel dans l’ordre juridique serbe, en tant que dernier voie de recours efficace de protection des droits et des libertés fondamentales, a ouvert la voie à la Cour constitutionnelle à une activité offrant une protection intégrale du droit électoral, dans la situation que la protection de ce droit fait défaut devant les tribunaux réguliers et les autres autorités étatiques. Malgré le fait que la compétence de la Cour constitutionnelle de Serbie de statuer sur les contentieux électoraux est subsidiaire et réduite aux seules violations du droit électoral commises durant la procédure électorale, le fait que les formules légales existantes n’assurent pas la protection juridique à tous les aspects du droit électoral engage la Cour constitutionnelle d’assurer désormais, en statuant sur les recours constitutionnels, la protection précisément de ces aspects du droit électoral, et notamment en cas de cessation du mandat des députés. C’est ainsi que dans la période à venir la Cour constitutionnelle affirmera son rôle dans la protection du droit électoral, et cela non par l’institut du contentieux électoral, mais par celui du recours constitutionnel. Donc, la protection du droit électoral dans l’ordre juridique de la République de Serbie est assurée en premier lieu par les juridictions réguliers et autres organes d’État lorsqu’il s’agit de la violation de ce droit au cours de la procédure électorale, tandis que la Cour constitutionnelle le fait en matière du droit réalisé ne bénéficiant d’aucune autre protection juridique.


  • [1]
    Dans ce sens, nous attirons votre attention sur notre toute récente jurisprudence lorsque la Cour constitutionnelle a jugé dans sa décision IУз – 52/2008 du 21 avril 2010 comme non-constitutionnelles des dispositions de l’article 43 de la Loi sur les élections locales (« Messager officiel de la RS », no 129/07), stipulant que la personne tête de liste distribue les mandats remportés aux candidats de la liste électorale selon son propre choix, et non en fonction de la place que le candidat occupait sur la liste, ainsi que la disposition de l’article 47, paragraphe 1 de la même loi régissant l’institut de convention entre le candidat aux élections et la personne tête de liste électorale, permettant de prévoir le droit de la personne tête de liste de présenter la démission d’un député à l’assemblée de l’unité d’autonomie locale, au nom de celui-ci, accordant ainsi à la personne tête de liste le droit de disposer librement des mandats des députés. Voir aussi les décisions de la Cour constitutionnelle de Serbie IУ-66/02, IУ-201/03 et IУ-249/03 du 25 septembre 2003, qualifiant de non-constitutionnelles les dispositions de l’article 152, paragraphe 1, point 9) de la Loi sur l’autonomie locale (« Messager Officiel de la RS », no 49/99 et 27/01) et les dispositions de l’article 45, paragraphe 1, point 1) et 10) de la Loi sur les élections locales (« Messager Officiel de la RS « , no 33/02).  [Retour au contenu]
  • [2]
    La Constitution de la République de Serbie (« Messager Officiel de la RS », n° 83/06) est entrée en vigueur le 8 novembre 2006.  [Retour au contenu]
  • [3]
    Voir plus en détail, B.Nenadić, Les contentieux électoraux relevant de la compétence de la Cour constitutionnelle de Serbie, Colloque : Question constitutionnelle en Serbie, Niš, 2004,p. 274.  [Retour au contenu]
  • [4]
    La Loi sur la Cour constitutionnelle (« Messager Officiel de la RS », no 109/07), entrée en vigueur le 6 décembre 2007, définit la procédure de décision de cette Cour sur les contentieux électoraux pour lesquels la compétence des tribunaux n’est pas définie. Ainsi les dispositions des articles 75 à 79 de cette Loi stipulent: premièrement, que la requête en vue de la décision sur un contentieux électoral pour lequel la compétence des tribunaux n’est pas définie par la loi peut être présentée par tout électeur, candidat à la fonction de président de la République ou de député, ainsi que par la personne proposant les candidats ; deuxièmement, que la requête doit contenir les raisons et les preuves sur lesquelles est assise la demande de décision sur le contentieux électoral concerné ; troisièmement, que la requête doit être présentée au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la date d’achèvement de la procédure électorale contestée ; quatrièmement, que la Cour constitutionnelle remet la demande de décision sur le contentieux électoral à l’organe chargé de la mise en oeuvre des élections dont l’activité est l’objet du contentieux (avec l’ordre de fournir à la Cour, dans un délai défini, une réponse et les actes électoraux pertinents, la documentation) ; cinquièmement, que, par sa décision, la Cour constitutionnelle annule toute la procédure électorale ou des parties de celle-ci (précisées dans la décision) mais à condition que l’irrégularité de la procédure électorale ait été prouvée, et qu’elle ait affecté substantiellement les résultats des élections ; sixièmement, que l’effet juridique de la décision de la Cour constitutionnelle annulant l’ensemble ou des parties de la procédure électorale commence à la date de la notification de la décision de la Cour constitutionnelle à l’autorité compétente ; septièmement, qu’un recours contre la décision sur la confirmation des mandats des députés peut être engagé par le candidat concerné et par la personne ayant proposé sa candidature, tandis que l’autorité contre laquelle le recours a été engagé est tenu de remettre à la Cours constitutionnelle la documentation nécessaire dans un délai de 24 heures du moment de l’engagement du recours; huitièmement, la Cour constitutionnelle est tenue d’arrêter une décision dans le délai de 72 heures à compter du moment de la réception du recours.  [Retour au contenu]
  • [5]
    Voir plus en détails B. Nenadić, op.cit, p. 278.  [Retour au contenu]
  • [6]
    En décidant sur un grand nombre de réclamations des violations du droit électoral, la Cour constitutionnelle a pris la position selon laquelle que les contentieux électoraux ne peuvent désormais être engagés devant cette Cour qu’en ce qui concerne la réalisation des droits garanti des citoyens, garantis par la Constitution, d’élire et d’être élus, mais non en ce qui concerne les irrégularités relevant de la cessation des mandats obtenus aux élections ou des violations des mandats des élus, pas plus qu’en ce qui concerne les violations des droits commises dans le cadre de l’élection ou de la révocation des personnes exerçant les fonctions définies par la Constitution. En prenant cette position la Cour constitutionnelle prenait en compte en premier lieu des dispositions de l’article 75, paragraphe 1 de la loi sur la Cour constitutionnelle, stipulant que « la requête en vue de la décision sur un contentieux électoral pour lequel la loi ne définit pas la compétence des tribunaux » peut être présentée par tout électeur, tout candidat à la fonction de président de la République, ou de député, ainsi que par les personnes ayant proposé les candidats.  [Retour au contenu]
  • [7]
    Voir plus en détail B. Nenadić,op.cit, p.283.  [Retour au contenu]
  • [8]
    En vertu de l’article 22, paragraphe 1 de la Constitution de la République de Serbie, chacun a le droit à la protection judiciaire en cas de violation ou de refus d’ un droit de l’homme ou des minorités garantis par la Constitution, ainsi qu’à l’élimination des dommages intervenus en conséquence de cette violation ou de ce refus. Cependant, la Loi sur l’élection des députés (« Messager Officiel de la RS РС », no 35/00) n’a toujours pas été harmonisé avec la Constitution. Voir plus en détails : B. Nenadić, Préface à la Loi sur la Cour constitutionnelle, Belgrade, 2008.  [Retour au contenu]

 

Fonctionnement de la Cour constitutionnelle du Togo en période électorale

par Tchalim KARBOU, secrétaire général de la Cour

 

Introduction

La Cour constitutionnelle est la plus haute juridiction de l’Etat togolais en matière constitutionnelle.

Elle est l’institution qui juge de la régularité des consultations référendaires, des élections présidentielles, législatives et sénatoriales. Elle statue sur le contentieux de ces consultations et élections.

Elle tient toutes ses attributions des dispositions constitutionnelles, notamment des articles 99; 104, alinéa 2 de la Constitution du 14 octobre 1992.

Au Togo, la mise en place de la Cour constitutionnelle répond au désir ardent des togolais de progresser vers la démocratie et le développement économique et social. Elle est garant, du respect de l’engagement B8 de la déclaration de Bamako, adoptée le 03 novembre 2000.

La préparation des consultations électorales au sein de la Cour constitutionnelle constitue une période plus ou moins chargée, avant, pendant et après les élections.

Les activités sont exécutées par l’ensemble des membres de la Cour avec tous leurs collaborateurs et les services du secrétariat général.

I – Avant le scrutin

a/ Travaux préparatoires

1- Élaboration du schéma de détermination des dates de l’élection présidentielle ou législative, du début du processus jusqu’à la proclamation des résultats définitifs.
2- Élaboration du chronogramme des activités de la Cour en période électorale.
3- Élaboration du budget électoral de l’Institution par le Secrétariat général, sous la supervision d’un membre de la Cour choisi par le Président.
4- Audience de prestation de serment des membres de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI).
5- Désignation par la Cour des médecins assermentés, pour constater, l’état général de bien-être physique et mental des candidats (élection présidentielle).
6- Audience de prestation de serment des médecins assermentés.
7- Organisation de séminaire interne de relecture des textes électoraux.

b/ Gestion du contentieux préélectoral

  • Notification à la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) et au ministre de l’Administration Territoriale, des décisions, relatives à la validation des candidatures ayant fait l’objet de contestation préélectorale.
  • Publication de la liste définitive des candidats par la Cour constitutionnelle après avoir purgé tout le contentieux des candidatures.

II – Pendant le scrutin

Conformément au code électoral initial du 8 juillet 1992, la Cour constitutionnelle était chargée de veiller à la régularité des opérations de vote. A cet effet, elle désignait des délégués parmi les magistrats des tribunaux qui procédaient au contrôle de régularités dans les bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire national. Ils contrôlaient les dépouillements des bulletins et le libre exercice des droits des électeurs et des candidats.

Les autorités administratives étaient tenues de leur accorder toute assistance souhaitée et de mettre à leur disposition toute information désirée. Cependant, dans la pratique, malgré leur dévouement, ces délégués de la Cour ne pouvaient jouer pleinement leur rôle. Par exemple ils ne pouvaient assister au dépouillement dans tous les bureaux de vote étant donné que chacun devait superviser des dizaines de bureaux.

Pour des raisons politiques plus que par souci d’efficacité, une réforme du code électoral, en l’an 2000 a retiré cette mission de supervision à la Cour et la confié à la CENI. Ainsi depuis l’an 2000, la Cour constitutionnelle du Togo ne dispose plus de délégués pour la supervision des opérations électorales sur le terrain. Le jour du vote la Cour ne contrôle rien.

III –  Après le vote

Il s’agit principalement ici de la gestion du contentieux post-électoral. Cette gestion du contentieux par le juge constitutionnel peut l’amener à prononcer une décision d’invalidation ou de rejet de la requête des requérants.

Depuis la réforme de l’an 2000, c’est la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui est chargée de la centralisation et de la publication des résultats provisoires de toutes les opérations électorales nationales (article 124 code électoral). C’est seulement après cette publication qu’elle doit dans un délai de huit (08) jours adresser à la cour sous la forme d’un rapport détaillé sur l’état des acquis et les cas de la contestation non réglés (article 124 code électoral)

Actuellement, c’est la Cour Constitutionnelle seule qui est habilitée à proclamer solennellement l’ensemble des résultats définitifs après examen des résultats provisoires et le règlement des cas de contentieux pour lesquels elle a été saisie (article 125). A partir de la modification du code électoral le 13 mars 2002, le juge constitutionnel reste le seul compétent à connaître de tous les litiges et plaintes nés en matière électorale (élections présidentielles, législatives, sénatoriales et référendum). Il a un délai de 08 jours à compter de la date de sa saisine pour rendre sa décision.

Les activités de la Cour en période électorale prennent fin quand il s’agit de l’élection présidentielle avec la prestation de serment du Président élu devant la Cour Constitutionnelle réunie en audience solennelle (article 64 constitution).

Il est à noter qu’après les législatives de 2007, la Cour, dans la perspective de bien réussir les scrutins futurs, a, avec l’appui de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) organisé un séminaire sous-régional ayant regroupé les institutions sœur à savoir : les Cours et Conseils constitutionnels du Bénin, du Burkina-Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali et du Niger ainsi que certaines institutions nationales impliquées dans l’organisation des élections. Ce séminaire avait pour objectif de relever les dysfonctionnements constatés lors des scrutins passés.

Parmi les dysfonctionnements constatés on retient l’absence d’envoi de délégués par la Cour sur le terrain lors du vote, constituant ainsi un handicap sérieux en matière de contrôle de la légalité et de la régularité du scrutin.

Une recommandation des séminaristes avait été formulée à l’endroit de la Cour, pour qu’elle dispose de ses propres délégués.
La Cour, lors de l’élection présidentielle du 04 mars 2010 dernier, a voulu traduire cette recommandation dans les faits, mais faute de moyens, elle n’a pu envoyer ses propres délégués sur le terrain.

IV/ Les contraintes de la Cour constitutionnelle en période électorale

La Cour constitutionnelle, dans l’exercice de ses missions en période électorale rencontre beaucoup de contraintes.

Sur le plan juridique :

1- L’instabilité juridique:

Il convient de rappeler ici que le code électoral sur lequel est basé l’organisation d’une élection et qui date au Togo du 8 juillet 1992 a été modifié dix fois (avril 1993 ; septembre 1997; avril 2000 ; mars 2002 ; février 2003 ; octobre 2003 ; janvier 2005 ; février 2007; juin 2007; avril 2009 ; août 2009), ce qui a pour conséquence la variation des compétences de la Cour et des confusions sujettes à plusieurs interprétations.

2- Insuffisance de moyens juridiques

3- Absence de transformation des accords politiques en textes de loi rendant ainsi, difficile leur application en période électorale.

Sur le plan financier :
Il y a une absence d’autonomie budgétaire.

La Cour en période électorale élabore son projet de budget et va le défendre au Ministère de l’Économie et des Finances. Ainsi, le budget mis à la disposition de la Cour par l’État est au bon vouloir du Ministère de l’Économie et des Finances. Mais ce budget reste toujours très insuffisant pour couvrir les dépenses électorales de la plus haute juridiction.

CONCLUSION

La Cour constitutionnelle, en période électorale mène ses activités tant bien que mal pour assurer des élections aux résultats transparentes acceptables par tous.

 

Le rôle et le fonctionnement du ministère de l’intérieur en période électorale en France

par Guy Prunier, chargé de mission au Conseil constitutionnel français

L’intitulé de l’intervention peut se résumer à une question simple : à quoi sert le ministère de l’intérieur en période électorale ? Je serais tenté par une réponse tout aussi synthétique : un peu à tout car le ministère est en permanence en période électorale, ne serait-ce que par la quasi annualité calendaire ! La diversité de ses domaines d’intervention n’est en effet pas simple à résumer car le ministère de l’intérieur est présent de façon continue dans le processus électoral, essentiellement dans son organisation, plus rarement dans son fonctionnement. En l’occurrence, le ministère est principalement représenté par le bureau des élections et des études politiques, qui exerce concrètement la quasi-totalité des attributions reconnues, en droit ou en fait, au ministère.

Pour tenir compte du thème général du colloque, un bon exemple de la diversité de ces interventions peut être donné par les liaisons, directes ou indirectes, avec le Conseil constitutionnel quand ce dernier exerce des attributions électorales, c’est-à-dire à l’occasion de l’élection présidentielle et du référendum et, dans une moindre mesure, à l’occasion des élections législatives et sénatoriales.

On peut, pour la commodité de l’exposé, distinguer les attributions permanentes du ministère de celles qui s’exercent à l’occasion de chaque scrutin.

A titre principal, le ministère élabore la législation électorale, dont il assure ensuite l’application. En quoi ce constat, a priori banal pour une administration centrale, présente-t-il une spécificité en matière électorale ?

Deux particularités méritent d’être signalées d’emblée.

La première réside dans l’importance du domaine de la loi dans le droit électoral et, à l’intérieur de celui-ci, dans l’ampleur du domaine législatif organique, du fait des renvois fréquents mentionnés dans la Constitution : organisation de l’élection présidentielle, éligibilité et inéligibilités des députés et des sénateurs, régime électoral de l’Assemblée nationale, du Sénat et des assemblées propres aux collectivités d’outre-mer, etc. L’ordre de grandeur général pourrait être ainsi énoncé :

  • 80% des normes applicables en droit électoral sont de nature législative, le reste est réglementaire ;
  • globalement, un peu moins d’un quart des normes législatives sont de nature organique.

Cette première caractéristique prend d’autant plus de relief au regard de la seconde, elle- même très particulière : la législation électorale est adoptée par les parlementaires, donc par des élus et, par voie de conséquence, par ceux qu’elle concerne au premier chef. C’est dire que les considérations politiques doivent être présumées, même lorsque la loi porte sur un aspect très technique. Elle doit être aussi présumée contestée. Voilà un premier point de liaison avec le Conseil constitutionnel français : il est peu de projets de loi élaborés par le ministère de l’intérieur en matière électorale qui ne finissent pas par un examen devant le Conseil constitutionnel. Cette observation vaut a fortiori pour toutes les dispositions organiques.

Les règles électorales sont codifiées, mais seulement en partie. Ainsi, des élections importantes sont redevables de textes séparés comme l’élection du Président de la République et les élections au Parlement européen. Par ailleurs, les référendums nationaux ne sont l’objet que d’un seul texte permanent, qui concerne les bureaux de vote à l’étranger, de nature seulement réglementaire et, de surcroît, maintenant périmé. Enfin, les textes applicables aux assemblées d’outre-mer sont inégalement codifiés. Toutefois, depuis une vingtaine d’années, à l’initiative du ministère compétent, un effort légistique important a contribué, dans un premier temps, à rapprocher le contenu du droit électoral applicable outre-mer de celui de métropole, puis, dans un second temps, à le codifier.

Par ailleurs, la structure du code s’est complexifiée au fil du temps. Le nombre de catégories de scrutins va croissant. Lors des deux précédentes codifications, en 1955 et en 1964, le code électoral concernait les élections municipales, cantonales et législatives auxquelles s’ajoutaient les élections sénatoriales. Au fur et à mesure des réformes, sont venues s’ajouter l’élection du Président de la République, les élections au Parlement européen, les élections à l’assemblée de Corse, les élections régionales et, avec des multiples étapes, les élections des assemblées propres aux collectivités d’outre-mer.

Enfin, au fil des années, le droit électoral s’est enrichi de domaines entièrement nouveaux, tels que l’organisation du vote des Français résidant hors de France, l’encadrement des sondages électoraux, les règles de plafonnement et de financement des campagnes électorales, et la participation à certains scrutins des citoyens européens non français. Il faut également mentionner des réformes plus ponctuelles, telles que, par exemple, le droit de vote par procuration, l’usage des machines à voter, la parité entre sexes, etc.

Par voie de conséquence, tous ces domaines ne relevant pas de ses attributions, le ministère de l’intérieur est fréquemment conduit à assurer une forme de coordination interministérielle. A l’administration pilote qu’est le ministère de l’intérieur, sont associés, le plus souvent, celui chargé de l’outre-mer et, de plus en plus fréquemment, le ministère des affaires étrangères.

On ne saurait non plus négliger la tendance générale à confier à des instances indépendantes la gestion d’une fraction du processus électoral. Parmi les structures les plus connues, notons la commission des sondages pour les sondages électoraux, la commission pour la transparence financière de la vie politique qui recueille les déclarations patrimoniales des élus et la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, qui s’occupe de contrôler le financement des campagnes des candidats à la plupart des élections et celui des partis politiques. Tous ces organismes, à intervalles réguliers, remettent aux pouvoirs publics des

rapports concluant en général à la nécessité de changer quelque chose dans le droit électoral en vigueur.

A cette liste, il faut ajouter le Conseil constitutionnel, qui, périodiquement, publie des observations sur les scrutins dont il exerce, peu ou prou, la surveillance, pour conclure dans le même sens. A cet égard, il est intéressant de noter l’existence d’une liaison du Conseil constitutionnel vers le ministère de l’intérieur. En effet, depuis toujours, le Conseil constitutionnel fait part aux pouvoirs publics de ses observations sur l’organisation des élections dont il a le contrôle. Depuis 1995, ces propositions sont largement rendues publiques et constituent, le plus souvent, le point de départ de réformes législatives. Parmi les exemples les plus marquants, on peut citer les observations sur le financement des campagnes électorales en 1995, les considérations, répétées en 2003, 2005 et 2008, relatives au découpage des circonscriptions électorales pour les élections législatives et les observations de 2005 sur le calendrier électoral de 2007, marqué par un afflux d’échéances quasi concomitantes.

Il en résulte donc que la loi électorale fluctue en permanence. On n’aura garde de réduire l’activité du ministère aux seuls textes qui sont présentés et adoptés. Il ne manque pas de projets de réformes envisagés puis ajournés pour les motifs les plus divers. Cette activité générale est doublée d’un cycle parallèle au niveau réglementaire, quantitativement de moindre importance, comme il vient d’être signalé, et qui n’appelle pas de commentaires particuliers.

A cet effet, sont rédigées séparément des instructions permanentes, en général à destination des maires mais pas nécessairement. Parmi les plus connues figurent les circulaires sur les modalités d’établissement et de révisions des listes électorales, sur l’exercice du vote par procuration, sur l’organisation et la tenue des bureaux de vote, etc.

Par ailleurs, le ministère de l’intérieur est chargé, en matière électorale, d’une mission générale d’assistance spécifique ou d’information des pouvoirs publics.

Traditionnellement, elle consiste à assurer le conseil technique des diverses réglementations électorales professionnelles, l’élection la plus considérable étant les élections prud’homales, gérées par le ministère du travail.

Le ministère assure également le suivi des mandats. A cet effet, le ministère est gestionnaire d’un fichier spécial dit « répertoire national des élus » qui recense l’ensemble des personnes dotées d’un mandat électif avec leur nuance politique, dans les conditions fixées par un décret de 2001. Ce fichier sert notamment à contrôler les cumuls de mandat et que la saisie des données s’effectue en préfecture. C’est par ce biais, par exemple, que le ministre de l’intérieur indique aux assemblées le nom du suppléant qui remplace un député ou un sénateur en cas d’interruption de mandat.

En outre, récemment, ces attributions ont été complétées par une mission de suivi de la carte des circonscriptions électorales, consécutivement à deux réformes. La première est l’institution par la révision constitutionnelle de 2008 d’une commission compétente pour le découpage des circonscriptions particulières à l’élection des députés et pour la répartition des sièges de sénateurs. Elle se prolonge par la redéfinition des cantons liée à la réforme de l’administration territoriale, qui s’est traduite par la création récente du mandat de conseiller territorial.

Enfin, d’une manière générale, le ministère est compétent pour mener toutes les études approfondies en matière électorale, notamment chaque fois qu’il est question de changer un mode de scrutin. On ne saurait trop insister sur le caractère essentiellement politique d’une telle démarche…

Le ministère met en œuvre le droit électoral ainsi préalablement défini à l’occasion de chaque scrutin.

L’une des premières décisions est d’en fixer la date et de convoquer les électeurs. A cette occasion sont révisés certains textes fixant des règles telles que des montants, des barèmes, par exemple l’actualisation du plafond des dépenses électorales, toutes décisions prises sous forme de décrets ou d’arrêtés.

Le ministère de l’intérieur, comme toute administration centrale, édicte des instructions à l’adresse des administrations locales, sous formes de circulaires. Ces instructions, rédigées en général dans le semestre précédant l’élection, s’adressent pour l’essentiel aux préfectures et, dans une moindre mesure, aux maires agents de l’Etat. Par le biais de ce réseau, traditionnel mais éprouvé, le ministère contribue à la diffusion de l’information officielle. Ces circulaires répondent à plusieurs préoccupations, les unes relatives à des procédures typiquement administratives, les autres plus caractéristiques du processus électoral.

Les préfectures constituent des relais importants du fait des compétences dévolues aux représentants de l’Etat, dont les plus marquantes sont les suivantes.

Informer les préfectures et les mairies de l’état du droit en vigueur n’est pas toujours une énonciation simple, notamment lorsqu’il s’agit d’élaborer le droit électoral applicable outre-mer ou détailler les effets d’une réforme récente. Le recours à la circulaire permet d’établir un texte de référence unique pour l’ensemble des destinataires, par exemple pour définir le sens à donner à une mesure nouvelle, préciser l’articulation entre plusieurs procédures voisines, rappeler les termes d’une jurisprudence, etc. Le souci d’encadrer l’activité des services locaux répond aussi à la volonté de s’assurer qu’un dispositif est bien appliqué aussi également que possible sur le territoire national, par exemple, qu’il n’existe pas une procédure différente d’enregistrement des candidatures par département.

Pour les élections locales, législatives et sénatoriales, la préfecture enregistre les candidatures. Elle vérifie la conformité des candidatures aux prescriptions légales, par exemple le nombre des candidats par rapport au nombre de sièges à pourvoir ou la règle de parité pour les scrutins de liste, ainsi que l’éligibilité des candidats. Ces listes de candidats sont rendues publiques au moyen de supports maintenant électroniques. Le ministère assure parallèlement la centralisation de ces candidatures et leur publication sur son site.

Le préfet désigne également les membres des commissions électorales locales, organismes le plus souvent temporaires. En effet, la France n’a pas, comme certains Etats, recours à une commission nationale indépendante qui contrôle l’ensemble du processus électoral.

Cette solution n’existe, d’ailleurs très partiellement, que pour l’élection présidentielle. En revanche, elle affectionne les commissions locales à attributions restreintes, assorties de désignations en cascade. Parmi celles-ci figurent les commissions de propagande, les commissions de recensement qui proclament les résultats au niveau local et les commissions de contrôle des opérations de vote dans les communes de plus de 20 000 habitants.

La première d’entre elles, la commission de propagande, s’assure de l’acheminement des documents de propagande des candidats adressés aux électeurs, lesquels documents comprennent une circulaire, dite aussi profession de foi, qui résume le programme politique du candidat ou de la liste de candidats et un bulletin de vote comportant les noms des candidats ou de leurs remplaçants. En termes de moyens, c’est une énorme logistique dont la préfecture a la charge puisqu’il s’agit de rassembler en un même point les circulaires et bulletins de vote des candidats et de les faire acheminer jusque chez les électeurs. Selon l’importance des départements, la préfecture a recours soit à des entreprises extérieures (les routeurs), soit à des recrutements externes opérés à cet effet (le plus souvent des chômeurs), soit aux personnels de la préfecture dans les plus petits départements.

Les préfectures assurent, d’une manière générale, la liaison avec les mairies. Par cet intermédiaire, les maires sont rendus destinataires des instructions du ministère. Outre celles qui ont été déjà signalées figurent le rappel des règles à respecter pour les opérations électorales. Il s’agit pour l’essentiel des règles relatives à la tenue des bureaux de vote et au dépouillement des suffrages, le cas échéant, à la proclamation des résultats pour les élections municipales ou cantonales pour lesquelles les résultats sont proclamés par l’autorité municipale.

C’est à ce titre de proximité avec les réalités locales que les préfectures sont chargées d’assurer l’information du ministère sur les données électorales, notamment en matière d’évolution prévisible des tendances du corps électoral. Un exercice attire tout particulièrement l’attention des responsables, bien qu’opéré dans la plus grande discrétion, celui des estimations de résultats, confiées aux cabinets des préfectures et synthétisées par le bureau des élections. Une activité plus anecdotique mais bien connue est celle de l’estimation du taux de participation le jour du vote qui résulte d’une centralisation des données recueillies dans chaque département.

La centralisation des résultats s’articule autour d’un dispositif maintenant électronique sur les détails duquel je ne m’appesantirais pas.

Pour l’exécution de l’ensemble de ces missions, le ministère dispose de moyens financiers, pour la majeure partie, délégués aux représentants de l’Etat. Le ministère délègue des enveloppes de crédits aux préfets, à charge pour eux de les affecter dans telles conditions à telles natures de dépenses, avec les échanges quotidiens et multiples de correspondances de toute nature que cette activité suppose.

A cet égard, le ministère exerce une compétence gestionnaire importante dans le processus électoral. Doit être à ce titre évoqué l’impression et l’acheminement de matériels électoraux tels que les enveloppes de scrutin, les formulaires de procuration, les formulaires de présentation d’une candidature à l’élection présidentielle, etc. Ces attributions conduisent à programmer les commandes correspondantes en vue de scrutins futurs, dont l’échéance est ainsi largement anticipée. Dans le même ordre interviennent les remboursements aux communes de matériels tels que les urnes, les isoloirs et les machines à voter.

Opérer le paiement définitif des dépenses générées par l’élection incombe en général aux préfectures, postérieurement au scrutin. Il s’agit de dépenses de toutes natures, le paiement des heures supplémentaires aux personnels, les prestations commandées par les préfectures, le remboursement des frais d’impression et d’affichage engagés par les candidats, le versement de subventions aux communes, etc. Compte tenu de la procédure de contrôle des comptes de campagne prévue par la loi, les dépenses les plus tardivement réglées, en général dans l’année qui suit l’élection, sont les remboursements forfaitaires aux candidats de leurs dépenses de campagne.

Le contentieux électoral est également traité dans des conditions qui varient d’un scrutin à l’autre. En la matière, la frontière des compétences centrales et locales, assez complexe, dépend en définitive de l’identification du juge compétent. Lorsqu’il s’agit du tribunal administratif, c’est le préfet qui suit le contentieux électoral. C’est le cas en matière d’élections municipales et cantonales. Lorsque c’est le Conseil d’Etat qui est compétent, c’est l’administration centrale, principalement le ministère de l’intérieur, qui opère. C’est le cas également pour les élections dont le juge est le Conseil constitutionnel. Au total, directement ou indirectement, le ministère suit très largement l’ensemble du contentieux des élections.

D’une manière générale, le ministère de l’intérieur assure l’interface entre les autorités centrales et « le terrain ». Si une instance a besoin de faire connaître sa position ou de communiquer sur un point quelconque avec les préfectures ou les mairies, le plus commode est de passer par l’intermédiaire du ministère de l’intérieur, bien que cette méthode n’ait rien d’obligatoire au plan juridique.

Pour illustrer mes dires, je prendrai trois exemples, à travers les scrutins placés sous la surveillance du Conseil constitutionnel : l’élection du Président de la République, le référendum national et le contentieux des élections législatives et sénatoriales.

L’élection du Président de la République présente, du point de vue juridique, la particularité d’être encadrée par un texte de nature entièrement organique, ce qui signifie que toutes ses modifications ont été examinées par le Conseil constitutionnel qui en a au préalable apprécié la conformité à la Constitution. En revanche, le texte initial ne l’a pas été puisqu’il s’agit de celui adopté en 1962 par la voie référendaire. Conformément aux conceptions de l’époque, il renvoie largement pour son application aux dispositions réglementaires.

Un décret fixe donc tous les aspects de l’élection non réglés par le texte organique. Or ils sont assez nombreux : par exemple, l’existence d’une commission nationale de contrôle de la campagne électorale, les règles de la campagne radiodiffusée et télévisée ou même les règles très dérogatoires du contentieux. En contrepartie, toute modification au décret d’application doit être soumise au Conseil constitutionnel avant sa publication (en plus du Conseil d’Etat).

Il en va de même de toutes les décisions particulières préalables à chaque élection présidentielle en vertu de l’ordonnance organisant le fonctionnement du Conseil constitutionnel. Il en va ainsi, par exemple, du décret de convocation des électeurs, mais aussi de toutes les circulaires spécifiques précédemment décrites. Afin de ne pas encombrer inutilement l’ordre du jour du Conseil, le texte de référence distingue les décisions (importantes), pour lesquelles le Conseil est « consulté », de celles (mineures) dont il est seulement « avisé ».

Cette tendance a conduit, dans le passé le plus récent, à une sorte de corédaction des textes. Il n’en a pas toujours été ainsi dans le passé.

Une autre forme de collaboration indispensable s’opère à propos du recueil des parrainages pour l’établissement de la liste des candidats. La collaboration des services se situe à deux niveaux.

Premièrement, la mise à disposition du Conseil constitutionnel du répertoire national des élus. Les « parrains » autorisés à présenter un candidat (environ 45 000 personnes) doivent être détenteurs d’un mandat électif et, quand ils en détiennent plusieurs, indiquer au titre duquel la présentation est faite.

Deuxièmement, la vérification de la détention des mandats, question qui se pose notamment pour les maires lorsque des élections partielles ou complémentaires sont intervenues pendant la période du parrainage.

A cet effet, le Conseil dispose d’une application qui, à partir des données déjà préalablement fournies, lui permet notamment de déceler les doubles parrainages et, d’une manière générale, les présentations qui lui paraissent irrégulières, à quelque titre que ce soit.

Pour les questions relatives à la campagne électorale, ni le Conseil constitutionnel, ni le ministère n’interviennent directement. De même pour les questions relatives à la campagne officielle. L’existence d’une commission nationale spéciale décharge d’autant l’activité du Conseil constitutionnel et, très partiellement, celle du ministère.

Les bulletins de vote sont imprimés selon un modèle uniforme établi préalablement par voie de circulaire sans que ni le ministère, ni le Conseil ne les voient avant leur impression. Bien évidemment, ces bulletins ne peuvent être imprimés par les soins de l’administration qu’après la publication par le Conseil de la liste des candidats soit au premier, soit au second tour. L’impression incombe aux préfectures qui confient cette prestation aux imprimeurs de leur choix.

Enfin la transmission des résultats s’effectue de façon maintenant concertée entre le Conseil et le ministère. Les résultats sont centralisés au niveau de chaque département par des moyens électroniques et transmis, directement et simultanément, au ministère et au Conseil constitutionnel. A ce stade, ils n’ont cependant qu’une valeur provisoire.

Le Conseil constitutionnel statue définitivement au vu des procès-verbaux et des contestations qui lui sont transmis par les voies d’acheminement les plus rapides à partir des préfectures. Le Conseil constitutionnel attribue les suffrages à chaque candidat pour chaque tour dans un délai généralement de trois jours. Dans le même temps, il tranche les contestations et règle donc ce qu’on peut appeler le contentieux de l’élection. Les résultats, le cas échéant modifiés, sont reproduits dans l’application du ministère de l’intérieur pour être portés à la connaissance du public sur son site.

Se pose ainsi régulièrement la question des modalités de transmission des résultats définitifs, compte tenu des décalages horaires avec certains bureaux de vote, tant de l’outre-mer que de l’étranger. A la suite de l’élection présidentielle de 2002, le Conseil constitutionnel a alerté les pouvoirs publics de ce problème dans une observation qui a été suivi d’effet, et d’ailleurs pas seulement pour l’élection présidentielle. Désormais, les électeurs d’Amérique (Antilles françaises, Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon, bureaux de vote des postes diplomatiques et consulaires du continent américain) votent le samedi ainsi que ceux de la Polynésie française. Toutefois, la question subsiste pour la communication de résultats partiels à partir des sites Internet basés à l’étranger. Le Conseil a récemment, en 2008, mis l’accent sur cette question. Selon toute vraisemblance, cette observation conduira à une réforme partielle dans une échéance encore difficile à programmer, bien qu’on puisse continuer à s’interroger sur l’efficacité finale de tels dispositifs pour les sites étrangers. Voilà, sur des points précis, autant d’exemples d’activités complémentaires.

Pour le référendum national, la complémentarité des activités est encore plus forte, en grande partie à cause du contexte juridique dans lequel s’inscrivent ces procédures de consultation. Pour mémoire, il s’agit là des référendums à l’initiative du Président de la République en application des articles 11 (réformes de structure), 88-5 (institutions européennes) ou 89 (révision) de la Constitution.

La particularité du contexte juridique, c’est qu’en dehors des règles découlant du texte constitutionnel et des attributions conférées au Conseil constitutionnel, le reste résulte des usages suivis depuis (au moins) 1958. Il n’existe en effet aucun cadre légal comparable au code électoral pour organiser un référendum. C’est pourquoi le Gouvernement rend applicables par décrets les dispositions utiles du code électoral, qu’elles soient de nature législative ou réglementaire, en les adaptant au contexte. Procéduralement, on opère comme pour l’élection présidentielle sur une plus grande échelle. En effet, c’est chaque fois tout un ensemble de textes qui, avant d’être mis en œuvre, sont soumis au préalable à l’examen du Conseil constitutionnel. Ce dernier est notamment saisi du décret de convocation des électeurs, du décret organisant le scrutin et de celui organisant la campagne.

Le premier décret comporte la particularité de constituer un texte sans contreseing ministériel en vertu de l’article 19 de la Constitution. Il est néanmoins soumis à l’examen du Conseil.

Le deuxième décret constitue une sorte de tronc commun, d’un référendum à l’autre, dont l’une des particularités est, au fil des décennies, la réduction puis la disparition des textes équivalents pris pour l’outre-mer ou le vote des Français à l’étranger. Depuis 2005, un seul texte détermine l’organisation du référendum. Le Conseil examine par la même occasion les documents adressés aux électeurs, dans lesquels figurent, outre les bulletins de vote comportant une réponse OUI ou NON, le texte de la question posée au corps électoral et celui des documents de référence (texte d’un projet de loi, de traité etc.). De la position du Conseil découle la possibilité pour le ministère de les faire imprimer et acheminer vers les préfectures.

Le troisième décret est chaque fois particulier à la campagne du référendum. Il ouvre le droit aux partis et groupements politiques « représentatifs » à participer à la campagne radiodiffusée et télévisée selon des critères de choix évolutifs, la variation portant sur l’énonciation des critères de représentativité retenus. Qu’est-ce, en effet, qu’un parti représentatif ? Un parti représenté au Parlement ? A la dernière élection nationale ? A la dernière élection au suffrage universel ? Les solutions diffèrent d’une consultation à l’autre. Le contrôle préalable du Conseil constitutionnel assure une garantie de contrôle extérieur dans les modalités d’élaboration, tout en lui donnant un droit de regard sur l’organisation de l’ensemble de la procédure, dont on remarque qu’elle émane presque intégralement du pouvoir exécutif.

Pour le référendum, il n’existe pas d’équivalent de la commission nationale pour l’élection présidentielle. On observera une innovation dans les textes adoptés en 2005 pour le dernier référendum national. Dans une certaine mesure, les dépenses de campagne engagées par les formations politiques habilitées sont prises en charge par l’Etat.

Pour le reste, le mécanisme de transmission et de proclamation des résultats est tout à fait comparable à celui des élections présidentielles.

Un dernier domaine de liaisons particulières entre le Conseil constitutionnel et le ministère de l’intérieur, à vrai dire plus classique mais néanmoins chaque fois de grande ampleur, résulte du traitement du contentieux des élections législatives et sénatoriales dont les règles sont définies par le code électoral. En quoi méritent-elles un développement particulier ? Précisément par ce que les textes ne disent pas. Les règles de procédure applicables en l’occurrence sont limitées au strict minimum (délai, lieu, recevabilité, etc.). La procédure est contradictoire : l’élu doit pouvoir se défendre ou présenter son argumentaire. Les pièces principales du dossier lui sont communiquées, en particulier les observations de l’administration.

Le juge électoral consulte systématiquement l’administration lors d’une contestation électorale. Le Conseil d’Etat agit pareillement, ainsi que les tribunaux administratifs à l’adresse des préfectures, chacun pour le contentieux qui leur est attribué. Il est intéressant de commenter cet usage non mentionné, donc non encadré, par les textes. En principe, le juge peut exiger tout élément d’information susceptible d’éclaire sa position et tout particulièrement les procès- verbaux de recensement des votes et de proclamation des résultats, assortis, le cas échéant, des protestations ainsi consignées. Mais le plus souvent, il accompagne cette requête d’une demande complémentaire d’information générale.

A quoi l’administration répond, non moins ordinairement. S’agissant des élections législatives et sénatoriales, c’est le plus souvent le ministère de l’intérieur qui procède au recueil des documents demandés, parfois le ministère chargé de l’outre-mer, exceptionnellement celui des affaires étrangères. L’administration n’est nullement partie dans un procès entre un élu qui affirme que l’élection est régulière de bout en bout et un ou plusieurs requérants qui affirment le contraire. L’instruction de l’affaire commence le plus souvent par la lecture de la seule pièce du dossier qui ne paraît pas (en principe) intéressée au résultat de l’élection. En revanche, l’instruction des dossiers par lesquels la Commission des comptes de campagne demande l’inéligibilité d’un candidat échappe à cette règle, sauf exception rarissime.

A ce titre, le ministère est en contact permanent avec le greffe du Conseil pour une assez longue durée, à savoir un bon semestre pour les élections législatives et quelques semaines pour les élections sénatoriales. Le nombre des requêtes utilement instruites concerne globalement une circonscription sur cinq aux élections législatives, soit de l’ordre de 100 à 120, ce qui, compte tenu d’une pluralité possible de requérants, correspond à environ deux cents requêtes recevables à traiter. Le contentieux des élections sénatoriales est d’ampleur plus restreinte, d’une part parce que moins de départements sont concernés, d’autre part parce que les règles de financement et de plafonnement des dépenses électorales ne s’y appliquent pas. Toutefois, à partir de 2011, le renouvellement du Sénat s’effectuera par moitié et non plus par tiers. On peut alors ainsi estimer l’ensemble des recours à quelques dizaines.

Les décisions sont notifiées expressément au ministre de l’intérieur à qui il appartient, le cas échéant en cas d’annulation, d’organiser l’élection partielle visant à pourvoir le ou les sièges ainsi rendus vacants.

En définitive, en abordant les points de rencontre des activités du Conseil et du ministère en matière électorale, on couvre assez largement le spectre électoral français. N’y échappent vraiment que les élections municipales dans les plus petites communes. On découvre en même temps que pour deux scrutins très particuliers, l’élection du Président de la République et le référendum national, le Conseil constitutionnel exerce des attributions en réalité très comparables à celles qui sont conférées en d’autres contextes et sous d’autres latitudes aux commissions nationales électorales. Je conclurais également, s’agissant du référendum national, sur l’importance du précédent dans l’élaboration d’une telle consultation, ce qui ne manque pas de demeurer paradoxal pour une procédure en définitive assez fréquente.

 

Conclusions du séminaire

par Maître Ndéye Maguette MBENGUE, Greffier en Chef du conseil constitutionnel du Sénégal.

Le 7éme séminaire des correspondants nationaux de l’ACCPUF s’est tenu à Paris les 18 et 19 novembre 2010 et avait pour thème « le fonctionnement des cours constitutionnelles en période électorale ».

En l’absence de Madame PETILLON secrétaire générale de l’association empêchée, Madame Valérie GOURRIER a souhaité la bienvenue aux correspondants avant de présenter le programme du séminaire.
Elle a ensuite fait un bref rappel des activités tant passées que futures de l’association. Elle s’est appesantie sur la coopération entre l’ACCPUF, l’OIF et la Commission de Venise.
Après la présentation des documents de travail, l’accent a été mis sur la mise à jour régulière du site de l’association.

Ce fut ensuite au tour de Madame Patricia HERDT de faire le point sur la coopération entre l’ACCPUF et l’OIF qui est basée sur une volonté de consolider l’Etat de droit et de développer une action commune en faveur de la justice constitutionnelle.
Elle est revenue sur les 40 ans de l’OIF et sur les 10 ans de la Déclaration de BAMAKO pour mettre l’accent sur les programmes de 4 ans qui permettent à l’OIF de développer un partenariat avec les cours membres de l’organisation francophone.
Le bilan de la mise en œuvre de la Déclaration de BAMAKO et les conclusions du sommet de MONTREUX ont permis de revenir sur les objectifs et défis de l’OIF qui a réitéré sa disponibilité à accompagner les cours francophones. Une présentation des publications de l’OIF avec le concours de l’ACCPUF et d’autres associations a été faite.
Pour finir Madame HERDT a parlé des perspectives de collaboration entre l’OIF, l’ACCPUF et les cours constitutionnelles.

Abordant le problème de l’accompagnement par l’OIF des cours constitutionnelles en période électorale, Monsieur ISSA ABDOURHAMANE a expliqué que conformément à la Déclaration de BAMAKO, l’OIF appuie les cours constitutionnelles par la tenue d’ateliers et de séminaires. Ceci permet de régler certaines difficultés et incompréhensions.
Sur le plan matériel, l’organisation équipe des juridictions et favorise les échanges entre elles par des missions de contact et d’observation.

Après ces exposés un tour de table a permis aux différents participants de se présenter. Diverses questions ont été soulevées notamment sur l’appui de l’OIF et de l’ACCPUF, la mise à disposition d’ouvrages de droit constitutionnels, les critères de choix des observateurs aux élections. Des réponses ont été apportées par Mesdames GOURRIER, HERDT et Monsieur ISSA ABDOURHAMANE.

Après la pause café, ce fut au tour de Monsieur DÜRR de faire un exposé détaillé sur le partenariat entre la Commission de Venise et l’ACCPUF. La Commission de Venise, organe du Conseil de l’Europe a été créé il y a 20 ans et regroupe 47 états membres et 10 pays observateurs. C’est un espace de dialogue et d’échange entre les juridictions constitutionnelles.
D’ailleurs depuis 1993, un bulletin trimestriel de jurisprudence constitutionnelle est publiée en français et en anglais, une base de données CODICES est mise en place et recueille les décisions abrégées des différentes cours.

Dans un proche avenir, il est envisagé la création d’une conférence mondiale sur la justice constitutionnelle, aussi Monsieur DÜRR est longuement revenu sur l’importance et la nécessité d’un tel organe. Il a beaucoup insisté sur la contribution des cours par l’envoi périodique de décisions abrégées, ce fut l’occasion pour lui de revenir sur la technique d’indexation des décisions.
Les participants ont soulevé le problème de la formation à l’indexation pour les cours entièrement ou partiellement renouvelées, des propositions ont été faites et seront étudiées pour y parvenir.

En dehors de sa compétence juridictionnelle, le conseil constitutionnel français est aussi juge du financement des partis politiques. Messieurs SEGUY et MOREAU ont donc parlé du rôle du service administratif et financier chargé de ce volet. Monsieur MOREAU a expliqué comment techniquement tout était géré en période électorale et comment de moins en moins on utilisait le support papier.
Les intervenants sont revenus sur les problèmes de la réception des documents, la gestion du personnel et de leur sécurité, problèmes communs à toutes les juridictions constitutionnelles.

Monsieur Régis FRAISSE a axé son intervention sur les procédures contentieuses en période électorale et sur le rôle du conseil constitutionnel qui intervient dans la phase préparatoire, arrête la liste des candidats et proclame les résultats.

Monsieur PRUNIER a défini ensuite le rôle du bureau des élections du Ministère de l’Intérieur chargé de préparer les textes qui gèrent les activités électorales. Le Ministère de l’Intérieur est gestionnaire du budget des élections, des documents électoraux et du répertoire national des élus.
Beaucoup de questions ont été soulevées notamment sur la phase préparatoire des élections et le code électoral. Des éclaircissements ont été apportés et beaucoup de participants ont débattu de ce qui se fait dans leurs pays respectifs.

Monsieur FRAISSE et Madame ARNOUD ont parlé des recours devant le conseil constitutionnel et du rôle du greffe, chargé de leur instruction.

La première journée du séminaire a été clôturée par un cocktail au Conseil constitutionnel et ce fut l’occasion pour Monsieur le président DEBRE d’expliquer les changements intervenus au niveau de sa juridiction avec la question prioritaire de constitutionnalité et la mise en place d’un vrai greffe. La précision et la clarté de son intervention ont été grandement appréciées par les correspondants.

Au deuxième jour du séminaire, Madame LAROUSSI, parlant du « fonctionnement du conseil constitutionnel algérien en période électorale », a relevé les spécificités propres à sa juridiction, au-delà des procédures communes à nos cours.
Les échanges ont porté sur le rôle du Ministère de l’Intérieur, le financement des partis politiques et les expériences d’autres cours.

Monsieur BRAU a présenté « le service documentation du conseil constitutionnel français » qui joue un rôle avant, pendant et après les élections. Des changements sont certes intervenus avec la question prioritaire de constitutionnalité et l’installation d’un vrai greffe désormais pérenne.

L’exposé de Monsieur DJEKIC sur la compétence de la cour constitutionnelle de SERBIE a permis d’appréhender les différences entre le système constitutionnel francophone et celui des pays de l’Est.

Au BENIN, la cour constitutionnelle, contrairement à d’autres cours, a un pouvoir d’auto saisine pour les irrégularités au niveau de l’élection présidentielle. Son expérience dans le domaine est à saluer, l’innovation de recourir à un collège de trois médecins (généraliste, cardiologue et psychiatre) pour un examen médical de tout candidat à l’élection présidentielle, a été au centre des discussions.

Monsieur MERCADAL a présenté l’IDEF (Institut International de Droit d’Expression et d’Inspiration Françaises) et le rôle qu’il joue dans le cadre du renforcement des liens entre juristes francophones. Il a cité l’exemple du traité de l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA).

Comme dans beaucoup de pays francophones, les juridictions constitutionnelles sont appelées à collaborer avec des CENI ou des CENA. A MADAGASCAR, le scénario est à l’image de celui de beaucoup de pays africains. Les discussions ont porté sur la période de transition, sur le retour à la légalité constitutionnelle et les compétences énormes de la CENI.

Au TOGO, si le processus est semblable à celui d’autres pays, le vrai problème est le
« tripatouillage »permanent du code électoral qui a subi au moins dix modifications. La raison en est que les acteurs politiques ne se font pas confiance. Comme au BENIN, des médecins sont désignés, mais ici par la cour, pour vérifier la santé physique et mentale des candidats à la présidentielle.

Au décès en cours de mandat du président BONGO, le GABON s’est trouvé devant une situation inédite et incertaine. La cour constitutionnelle a donc joué un rôle primordial et décisif dans la gestion de cette transition en mettant en place un mécanisme faisant du président de la République par intérim, un président avec toutes les prérogatives.

En ROUMANIE, plusieurs organismes sont impliqués dans le processus électoral. Les recours sont portés devant la cour qui a la possibilité d’annuler les résultats des votes pour cause de fraude électorale. Ses compétences sont certes importantes mais comme partout ailleurs tout n’est pas parfait, il y est préconisé la nécessité d’un nouveau code électoral.

Voilà donc restitués de façon succincte les travaux du 7 éme séminaire des correspondants nationaux de l’ACCPUF, séminaire qui leur a permis de se retrouver pour échanger sur leurs expériences individuelles.

Je ne saurai terminer sans remercier l’OIF, l’ACCPUF, la Commission de Venise mais surtout Madame Valérie GOURRIER et l’équipe qui lui a permis d’organiser avec brio ce séminaire. Je vous remercie.

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